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Qui croit à l’astrologie ?
"Odyssée", France Inter, 1er Avril 2003

6 mars 2005

L’astrologie, pratique divinatoire très ancienne, présuppose que notre existence est influencée par les astres depuis notre naissance et tout au long de notre vie. Pour les astrologues, l’astrologie est une science.



Qu’est-ce qu’une science ? C’est un ensemble cohérent de faits obéissant à trois principes intangibles :
1° ils sont observables ;
2° ils sont mesurables ;
3° ils peuvent être reproduits à l’infini.
Bref, un fait scientifique obéit à des lois vérifiables. Tenez-vous debout avec une assiette dans votre cuisine, si vous mettez l’assiette à la hauteur de vos yeux et si vous la lâchez, elle tombe.

Vous pouvez observer cette chute, mesurer sa vitesse et la reproduire à l’infini. Vous aurez beau essayer un milliard de fois, elle tombera toujours et, sauf si vous changez les conditions expérimentales de la chute (en prenant une assiette en papier ou en étain, par exemple, ou en mettant un coussin dessous), cette chute se produira toujours de la même manière et probablement avec le même résultat : des débris par terre.

Pourquoi ? Parce que les corps célestes obéissent aux lois de la gravitation - on le sait depuis un peu plus de deux cents ans grâce à Isaac Newton - ou un peu plus récemment si on a lu Gotlib - et aujourd’hui, ça ne se discute plus, pas plus qu’on ne conteste, dans la plupart des régions de la planète, que la terre est une sphère, et non un plateau avec des shadoks d’en haut, qui poussent vers le bas, et des shadoks d’en bas, qui empêchent ceux du haut de tomber.
Vous noterez en passant qu’il n’est absolument pas nécessaire d’être physicien pour constater l’existence de la gravitation au moyen de la chute des corps : n’importe qui peut le faire, et les bébés commencent très tôt avec les lunettes de leur papa.

Si l’on considère en revanche l’astrologie et son outil de base, le thème astral, on constate rapidement que les « faits astrologiques » ne sont ni observables, ni mesurables, ni reproductibles de manière expérimentale par le commun des mortels. Curieusement, seuls les atrologues savent le faire. Et pour cause : le thème astral est défini à partir de la constellation qui se trouve derrière le soleil le jour de la naissance - le verseau, la balance, le capricorne, etc.. Selon la théorie astrologique, cette constellation formée d’étoiles lointaines et les autres planètes du système solaire auraient sur chacun de nous plus d’effet que le soleil, la lune et la terre, qui sont tout de même beaucoup plus près.

Le seul problème, c’est qu’une constellation, ça n’existe pas en tant que tel. Chaque constellation n’est qu’une construction visuelle, en deux dimensions, à partir d’objets célestes qui ne sont pas du tout proches les uns des autres - certains sont très éloignés de la terre, d’autres moins - mais sont regroupés artificiellement parce qu’ils sont visibles dans le même secteur du ciel.

Une constellation, c’est une série de point lumineux reliés mentalement par des pointillés et dont les formes bizarres sont tout aussi arbitraires que celles des nuages un jour d’été. Saviez-vous par exemple que la grande ourse, en Amérique, s’appelle the big dipper, la grande casserole ? Et quand vous entendez les astrologues dire sur un ton docte par exemple que « le soleil est entré dans le signe du Capricorne » rappelez-vous : le soleil ne rentre dans rien du tout. Par rapport aux autres étoiles, il ne bouge pas, c’est la terre qui bouge. Autrement dit, faire croire que les mouvements des astres conditionnent notre vie future, c’est aussi sérieux que faire croire à une petite fille que la lune joue à cache-cache derrière le clocher...

Ces petites objections toutes simples, évidemment, les astrologues les contestent vivement, car la crédulité est quand même leur fonds de commerce. Et cette crédulité n’épargne personne. A divination, divination et demie : comme nous l’apprend la petite mais valeureuse revue Sciences et pseudo-sciences dans son numéro de mars, des banques et des agents de change font régulièrement appel à des astrologues pour élaborer leurs prédictions boursières ! Et je vous assure que ce n’est pas un poisson d’avril.

Bon, les auditeurs pensent ce qu’ils veulent, mais pour ma part, la seule idée que les courtiers s’en remettent à l’astrologie pour prédire les mouvements de la bourse m’incite fortement à n’accorder aucun crédit, ni à l’une ni à l’autre. D’autant plus qu’au jour d’aujourd’hui, dans l’univers capitaliste, la bourse est souvent un dés...astre.

Sciences et pseudo-sciences, mars 2003, n°256
Revue publiée par l’AFIS (Association française pour l’information scientifique), 14, rue de l’Ecole-Polytechnique, 75005 Paris




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