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Contraception : questions / réponses 16

14 décembre 2004


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Les sujets abordés cette semaine :

- Examens médicaux indispensables avant la prescription d’une pilule
- Quantité d’hormone délivrée par le DIU (Mirena)
- Pharmaciens et Norlevo
- Allaitement et contraception

- Examens médicaux indispensables avant la prescription d’une pilule

J’ai 27 ans et je n’ai jamais pris la pilule. Je suis excessivement pudique et l’idée de rencontrer un gynéco me terrifie. Après lecture de vos articles, j’ai décidé de demander la prescription de la pilule à un médecin généraliste. Quels sont les examens médicaux qu’il me demandera ?
Z.

A priori, si vous n’avez pas de problème de santé particulier, il n’a pas à vous imposer d’examen clinique (il n’a pas à vous faire d’examen gynécologique ou d’examen des seins). Je pense que vous devriez lire la page suivante du site :

http://www.martinwinckler.com/article.php3?id_article=307

Ensuite, vous devriez annoncer la couleur à votre médecin (en lui faisant lire l’article en question : je suis plutôt connu parmi les généralistes), afin de mettre cartes sur table. S’il hésite à vous prescrire la pilule sans vous examiner, dites-lui tout simplement qu’à votre âge, le risque d’une grossesse est bien supérieur à celui d’un hypothétique cancer du col ou du sein. Enfin, répondez à toutes ses questions aussi précisément que possible. C’est principalement la liste de vos antécédents (maladies ou hospitalisations) et ceux de votre famille qui permet de déterminer si la prise de la pilule est, ou non, appropriée.

Il est possible qu’il vous prescrive une prise de sang. Et, bien sûr, quand vous aurez pris contact, une fois que vous vous sentirez en sécurité, il (ou elle) vous proposera un frottis du col de l’utérus, examen de prévention des cancers du col de l’utérus. Demandez-lui comment on le fait, en quoi ça consiste. C’est un examen désagréable, mais non douloureux et rapide à faire. Cela dit, il ne présente aucun caractère d’urgence : ça peut attendre.

- Quantité d’hormone délivrée par le DIU (Mirena)

Je souhaiterais connaître la quantité d’hormone libérée par le DIU Mirena 52 mg. Est-elle supérieure ou inférieure à la quantité reçue par une contraception sous pilule (Mercilon) ? Quels sont les risques par rapport aux traitements sous pilule ou aux traitements pour la ménopause ?
S.

La quantité d’hormone contenue dans un DIU Mirena est une infime partie de celle qui peut être administrée par des pilules oestro-progestatives ou même progestatives seules assimilées par la bouche.
Et cela s’explique très simplement : pour être contraceptive par voie orale, une hormone doit être digérée, puis passer dans le sang, pour "faire croire" à l’hypophyse (la glande du cerveau qui commande l’ovulation) que la femme est déjà enceinte. il faut donc en donner beaucoup (car une grande partie est dégradée par le foie au moment de la digestion) pour qu’il en passe un peu dans le sang. L’hormone contenue dans l’implant contraceptif (dispositif qui est glissé sous la peau du bras) diffuse, elle, dans le sang, SANS passer par le tube digestif ni par le foie ; la quantité d’hormone contenue dans un implant (efficace 3 ans) est donc bien moindre que la quantité d’hormones dans 3 x 12 plaquettes de pilules.

Le DIU Mirena contient le même type d’hormone que l’implant, mais son action contraceptive est locale, et non générale : l’hormone agit essentiellement sur l’utérus, et n’a pas besoin de passer dans le sang pour aller jusqu’à l’hypophyse. L’action contraceptive consiste avant tout à rendre les sécrétions du col de l’utérus (l’orifice de l’utérus qui donne sur le vagin) impénétrables pour les spermatozoïdes. L’autre action (moins essentielle, mais qui a beaucoup d’intérêt pour les femmes ayant des règles douloureuses) est de diminuer l’épaisseur de l’endomètre - le tissu qui tapisse l’intérieur de l’utérus et qui se détache au moment des règles. Ce qui fait que le DIU hormonal est la contraception de choix pour les femmes qui ont habituellement des règles douloureuses et abondantes, qui veulent une contraception très efficace et un minimum de désagrément.

Quant aux "risques", seule une des deux hormones de la pilule (l’oestrogène - éthynil oestradiol) présente des risques - essentiellement vasculaires, chez les femmes qui fument et ont plus de 35 ans. L’autre (le progestatif) est sans danger, et l’Implant et le DIU hormonal ne contiennent qu’un progestatif, ce qui permet à un très grand nombre de femmes de les utiliser. En fait, à ce jour, je n’ai jamais rencontré de femmes ayant besoin d’une contraception et à qui il n’était pas possible de prescrire une contraception par progestatifs seuls. Car les situations qui contre-indiquent ce type de contraception sont souvent inhérentes à des maladies très graves, au cours desquelles, malheureusement la sexualité est rarement possible.
Dans les traitements de la ménopause, ce sont également les oestrogènes qui ont été soupçonnés de révéler ou d’accélérer des maladies. Les progestatifs, eux, sont dans ce cas là, également, sans danger.

- Pharmaciens et Norlevo

Plusieurs patientes mineures m’ont fait part de difficultés à se faire délivrer du Norlevo (contraception d’urgence) par des pharmacies. En principe la délivrance du Norlevo est gratuite pour les mineures. En pratique, des pharmaciens la refusent, ou font payer la substance, ce qui évidemment est un frein à sa libre obtention par les mineures. Quelle est exactement la réglementation en la matière ? Les pharmaciens ont-ils le droit de refuser ? Ont-ils celui de faire payer une mineure ? J’ai posé la question à Salomé Viviana qui, en juriste émérite, contribue régulièrement au Webzine. Voici sa réponse.
MW.

Voici les deux articles du code de la santé publique qui traitent directement du sujet :

Article D5134-1

La délivrance aux mineures des médicaments indiqués dans la contraception d’urgence et non soumis à prescription médicale obligatoire en vertu du deuxième alinéa de l’article L. 5134-1 est effectuée dans les conditions de confidentialité permettant la tenue d’une conversation à l’abri des tiers.
Outre le respect des dispositions de l’article R. 4235-48, la délivrance par le pharmacien est précédée d’un entretien tendant à s’assurer que la situation de la personne mineure correspond aux critères d’urgence et aux conditions d’utilisation de cette contraception. L’entretien permet également au pharmacien de fournir à la mineure une information sur l’accès à une contraception régulière, sur la prévention des maladies sexuellement transmissibles et sur l’intérêt d’un suivi médical. Cette information est complétée par la remise de la documentation dont dispose le pharmacien sur ces sujets. Le pharmacien communique également à la mineure les coordonnées du centre de planification ou d’éducation familiale le plus proche.

Article D5134-3

Lorsque la délivrance à une mineure de médicaments indiqués dans la contraception d’urgence a été effectuée, le pharmacien adresse à la caisse d’assurance maladie dont il dépend une facture établie sur une feuille de soins ne comportant pas l’identification de l’assuré et du bénéficiaire et utilisant un support papier, sur laquelle est collée la vignette de la boîte délivrée.
Cet envoi peut faire l’objet d’une transmission électronique.

Pour info, voilà ce que dit l’article R4235-48 visé au D5134-1 :

Le pharmacien doit assurer dans son intégralité l’acte de dispensation du médicament, associant à sa délivrance :
1º L’analyse pharmaceutique de l’ordonnance médicale si elle existe ;
2º La préparation éventuelle des doses à administrer ;
3º La mise à disposition des informations et les conseils nécessaires au bon usage du médicament.
Il a un devoir particulier de conseil lorsqu’il est amené à délivrer un médicament qui ne requiert pas une prescription médicale.
Il doit, par des conseils appropriés et dans le domaine de ses compétences, participer au soutien apporté au patient.

C’est clair : un pharmacien ne peut pas légalement refuser de délivrer gratuitement une contraception d’urgence à une mineure qui en fait la demande. La seule chose, c’est qu’il doit vérifier que la personne est bien mineure (j’avais lu quelque part mais je ne sais plus où qu’on demandait aux pharmaciens de se contenter d’une simple déclaration ; les mineures n’ont pas toujours de pièce d’identité et comme ça, on respecte un certain anonymat qui peut mettre l’intéressée en confiance), et que sa situation répond bien aux critères d’urgence (j’imagine qu’il s’agit d’une question de délai depuis le rapport non protégé. Il faudrait que les pharmaciens n’en profitent pas pour dire à la mineure d’aller voir ailleurs, s’il lui reste 24 ou 48 heures avant la fin du délai !). [1]

Les pharmaciens sont en outre tenus au secret professionnel. [2]
Par ailleurs, l’envoi de la vignette à la CPAM laisse supposer que le pharmacien peut se faire rembourser.
 [3]

Alors pourquoi refuser de délivrer le Norlevo ? Par convictions personnelles ? [4]
Vous avez remarqué que les textes ne prévoient pas de sanctions spécifiques à l’encontre des "pharmaciens récalcitrants". C’est donc la procédure habituelle qui s’applique (plainte au conseil de l’ordre).

Salomé Viviana (juriste)

- Allaitement et contraception

Dans ses recommandations, l’ANAES continue à dire que l’allaitement exclusif jusqu’à six mois est une contraception efficace. En réalité, c’est très variable d’une femme à l’autre.
En ce qui me concerne, j’ai eu à chaque fois mon retour de couches au bout de trois mois environ, alors que j’allaitais exclusivement au sein et que les tétées étaient toujours très fréquentes, même la nuit. Les sages-femmes le savent bien et mettent souvent en garde les jeunes mamans. La Leche League, association de soutien à l’allaitement, aussi ; apparemment, pas mal de femmes qui se croyaient protégées par l’allaitement se retrouvent enceintes alors qu’elles ne le souhaitaient pas.
S.

C’est parfaitement exact, c’est pourquoi les recommandations mondiales (de l’OMS) sont :

1° l’allaitement exclusif (tétée à la demande, sans apport de lait extérieur au bébé) est contraceptif (98% d’efficacité)

2° jusqu’à 6 mois (et pas au-delà, car les ovulations reprennent)

si, et seulement si

3° il y n’a pas eu de retour de couches (car retour de couche = fin du premier cycle où il y a eu ovulation !!!)

Je suis bien d’accord avec l’analyse, le problème, c’est la formulation.
En disant que l’allaitement est une contraception efficace s’il n’y a pas eu de retour de couches, le problème est que certaines mères qui allaitent attendent leur retour de couches pour prendre une contraception. Elles ne réalisent pas que le retour de couches signifie qu’il y a déjà eu une ovulation. C’est ce qui fait que des femmes qui allaitent et n’utilisent pas de contraception se retrouvent enceintes alors qu’elles n’ont pas eu leur retour de couches !

Il faut donc absolument dire aux femmes qui allaitent et ne veulent pas se retrouver enceintes de prendre une contraception.
S.

Oui, et comme les femmes qui allaitent de manière exclusive sont rares, et que celles qui le font ne savent pas toujours quand elles vont arrêter (parfois, c’est le bébé qui arrête !!!) il vaut mieux adjoindre une pilule progestative (Microval, Cérazette), à prendre au bout de quelques semaines, ou dès qu’on sent que le sein ne suffit plus au bébé... ou qu’on est si fatiguée qu’on est contente que le papa donne le biberon. Le progestatif de ce type de pilule passe en quantité infinitésimale dans le lait, n’est pas toxique pour le bébé et ne compromet pas l’allaitement.

Et si une maman redoute vraiment les hormones pendant l’allaitement, un DIU peut être posé deux mois après l’accouchement, avant tout "retour de couches". Ainsi, on peut allaiter, puis sevrer progressivement son bébé sans se préoccuper de contraception. Le plus prudent, pour une maman qui veut allaiter, est donc de... se faire prescrire une pilule progestative (Microval ou Cérazette) ou un DIU (TT 380 ou Mirena - car l’hormone du Mirena ne diffuse pratiquement pas dans l’organisme de la maman, et donc pas non plus dans le lait) AVANT d’accoucher (à la visite du 8e mois, par exemple). Comme ça, quand elles sortent de la maternité, elles sont parées...

P.S.


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[1Note : le Norlevo est efficace surtout pendant les 3 premiers jours qui suivent un rapport non protégé. Mais il n’est pas sans efficacité pendant le 4e et 5e jour. Lorsqu’une femme vient me consulter 4 ou 5 jours après un rapport sexuel, je lui prescris ou lui délivre du Norlevo sans discuter. Les pharmaciens devraient faire de même. MW

[2Il n’est pas inutile de le rappeler, car nombreuses sont les adolescentes qui hésitent à demander du Norlevo à la pharmacie de leur quartier ou de leur village, dans la crainte que cela ne leur attire des commentaires ou même une indiscrétion auprès d’un membre de leur famille. Rappelons qu’un professionnel de santé peut être poursuivi pour violation du secret professionnel. MW

[3Note : C’est le cas. Les pharmaciens déclarent les boîtes délivrées et la sécurité sociale les rembourse rapidement. MW

[4Note : Sans doute pour les mêmes raisons que des médecins refusent une contraception aux mêmes adolescentes. Ils se prennent pour leurs parents, ou pour leurs directeurs de conscience. MW




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