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Quand on donne son sang, qu’est-ce qu’on donne ?
"Odyssée" - France Inter, 24 Juin 2003
Article du 11 décembre 2005

Le don de sang ne pose pas du tout les mêmes problèmes ou les mêmes dilemmes que le don d’organes, car on peut donner son sang régulièrement sans avoir besoin de mourir.

De plus, le don de sang est vraiment une sorte de mise en commun d’une ressource vitale et tous les groupes sanguins sont les bienvenus de sorte que le don peut bénéficier absolument à tout le monde, sauf aux rares personnes qui le refusent pour des raisons religieuses - ce qui, je le rappelle, est leur droit le plus strict.

Bon, mais quand on donne son sang, qu’est-ce qu’on donne ? Le sang est composé en gros de deux choses : un liquide, que l’on nomme le plasma, et trois grandes catégories de cellules ; les globules rouges, qui transportent l’oxygène des poumons jusqu’aux organes et rapportent le gaz carbonique des organes jusqu’aux poumons pour l’éliminer dans la respiration ; les globules blancs - leucocytes, lymphocytes - cellules de défense de l’organisme, chargées de lutter contre les microbes ; et les plaquettes qui contribuent à la coagulation et interrompent les saignements en cas de blessure.

Comment se passe un don de sang ? D’abord on vous demande de répondre à un questionnaire un peu indiscret mais confidentiel, pour éviter de vous prélever du sang si vous êtes susceptible de transmettre une maladie ou si cela risque de vous être nuisible.

Ensuite, on vous installe confortablement dans un fauteuil, une infirmière glisse une aiguille dans une veine au pli du coude et le sang s’écoule par un tube dans une poche contenant une substance qui l’empêche de coaguler.

On prélève entre 400 et 500 ml (un demi-litre), ce qui ne représent que 10 % de la masse sanguine. Ensuite, on vous donne une collation et une fois restauré vous rentrez chez vous ou vous reprenez votre activité.

Le tout dure à peu près une demi-heure. Un peu plus, si vous prenez le temps de discuter avec les autres donneurs autour d’un sandwich et d’une tasse de thé.

Est-il dangereux de donner son sang ? Non, pas plus que de subir une « prise de sang » pour un examen, puisqu’on n’introduit rien d’autre dans les veines qu’une aiguille stérile à usage unique. Un individu en bonne santé fabrique des cellules sanguines en permanence, il régénère rapidement le demi-litre de sang prélevé et il peut de nouveau faire un don de sang deux mois plus tard.

Entre 18 et 65 ans, les hommes peuvent faire cinq dons par an, les femmes trois seulement pour tenir compte de la perte de sang des règles. Les dons de plaquettes et de plasma consistent, eux, à prélever du sang, à le faire passer sur une machine qu’on appelle un séparateur pour en retirer l’élément voulu et à restituer le reste du sang au donneur.

Le plasma permet de préparer des facteurs de la coagulation qui permettent d’interrompre les hémorragies chez les hémophiles ; des immunoglobulines pour les patients souffrant d’une atteinte de l’immunité ; ou de l’albumine, qui sert beaucoup en réanimation des brûlés. Les plaquettes, elles, sont destinées à des malades dont les plaquettes ont été détruites par une maladie ou qui ne peuvent plus en fabriquer.

Ces deux formes de dons sont un peu plus longues : trois quarts d’heure pour le plasma, deux heures pour les plaquettes. Mais ça n’est pas plus long qu’une séance de cinéma et vous pouvez lire un bon bouquin pendant ce temps-là.

Il y a trente ans, à Tours, quand j’étais étudiant, les infirmières du centre de transfusion me confiaient que les futurs médecins étaient ceux qui donnaient le moins de sang. Cette année, d’après ce que m’a écrit une auditrice étudiante, cela semble toujours être le cas. Alors, un petit appel aux étudiants en médecine : faites donc mentir les statistiques en allant donner votre sang. Ca ne vous tuera pas, et vous rencontrerez sûrement des gens sympathiques, généreux et vivants.

Un jour, j’ai croisé un couple d’une soixantaine d’années. Ils m’ont expliqué qu’ils s’étaient rencontrés vingt-cinq ans plus tôt, un jour qu’ils venaient donner leur sang. Depuis, ils vont en donner ensemble, deux fois par an. Aux dates anniversaires de leur rencontre et de leur mariage.

Martin Winckler

http://www.dondusang.com/

* * *

A la suite de cette chronique, une auditrice m’a écrit :

« C’est l’histoire vraie d’une auditrice qui a eu tellement de problèmes de santé et à qui on a injecté tellement de saloperies qu’elle ne peut pas et ne pourra jamais donner son sang, ses plaquettes, ses organes.

« Avant d’être malade, et même pendant, elle se baladait avec une carte qu’elle avait récupérée par hasard dans le hall du CHU. C’est une « carte de donneur » de l’Etablissement français des greffes. En se baladant avec ça, on évite à sa famille de devoir se prononcer sur un sujet très sensible et douloureux au pire moment du deuil.

« Donc, au cours de sa dernière chimio, la jeune fille en question, allongée à côté d’autres malades dans le service d’hématologie, voit bien toutes les poches de sang et de plaquettes que ces malades reçoivent. Elle voit bien que tout le monde - infirmières, médecins, malades - attendent pendant des heures « que les plaquettes arrivent ». Et elle se dit : « C’est ma dernière chimio, je suis guérie, je vais donner mon sang ». Elle attrape son hématologue qui passe par là et lui demande : « Quand est-ce que j’aurai le droit de donner mon sang ? », et on lui répond en substance : « Jamais ».

« A côté de son lit, il y a sa maman et son pote Valentin qui est venu pour la dernière chimio. Alors Valentin dit qu’il donnera son sang à sa place.
« Quelques semaines plus tard, elle parle avec Valentin. Il est allé à l’EFS de Brest, a passé l’entretien avec le médecin, et a été rejeté. Pourquoi ? Parce qu’il est homosexuel. Il se protège, il a un partenaire unique, mais ne peut pas donner son sang, du seul fait de sa sexualité.

« Là, moi, je ne comprends pas. Ce ne devrait pas être l’orientation sexuelle qui détermine l’aptitude à donner du sang, mais plutôt la façon dont on vit sa sexualité, non ? Il me semble qu’une hétéro qui a des partenaires multiples et se protège une fois sur huit est plus dangereuse que mon pote Valentin.. »

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