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Pourquoi France Inter a viré Martin Winckler
Transfert.net - le 16 juillet 2003
Article du 16 juillet 2003

Le chroniqueur aurait trop critiqué l’industrie pharmaceutique, gros annonceur de la radio publique

Prévue jusqu’au 11 juillet 2003, "Odyssée", la chronique quotidienne du romancier et médecin Martin Winckler a été interrompue le 4 juillet 2003 par la direction de France Inter. L’auteur de la Maladie de Sachs explique sa mise à l’index par des pressions exercées sur la radio publique par les industriels du médicament, qui n’auraient guère apprécié la diffusion, le 15 mai dernier, d’un billet assassin contre certaines pratiques "malhonnêtes" des laboratoires pharmaceutiques.

Ledit billet résumait les thèses d’un récent livre d’enquête très critique à l’encontre des grands groupes de santé (Le grand secret de l’industrie pharmaceutique, de Philippe Pignarre, aux éditions La Découverte). En verve - manifestement un peu trop aux yeux de certains - Martin Winckler dénonçait pêle-mêle "les tests de médicaments au rabais dans les pays de tiers-monde", "les résultats d’études cliniques (...) truqués", "les nouvelles maladies imaginaires" ou encore le peu d’indépendance de la presse médicale française.

Martin Winckler raconte que un mois et demi après la diffusion de ce billet, le vendredi 4 juillet, l’assistante de Jean-Luc Hees, directeur de France Inter, l’a appelé pour lui signifier que sa chronique matutinale du jour serait la dernière.

Motif invoqué par la direction de France Inter : la chronique de Winckler, au départ une tribune généraliste, était devenue "trop médicale". Une justification que l’intéressé conteste aujourd’hui. "Elle était surtout ’trop pointue’, ’trop agressive’, ’trop critique’ par rapport au traitement de l’information sur la santé habituellement fait sur France Inter", dit-il.

Chère publicité
Depuis le mois de juin, France Inter et France Info diffusent plusieurs fois par jour une campagne publicitaire du Leem, le lobby français des "entreprises du médicament" destinée, selon ces dernières, à "rappeler la réalité de leur contribution à la santé des Français". L’irrévérencieux Winckler avait débuté sa chronique du 15 mai en annonçant : "Le motif de cette campagne, c’est que l’industrie pharmaceutique est en crise". Est-ce cette affirmation peu amène qui a valu au chroniqueur d’être débarqué ? Interrogée par Transfert, la direction de France Inter n’a pas trouvé le temps de nous éclairer sur ce point. On peut simplement rappeler que le statut public de France Inter ne lui permet de diffuser que très peu de publicité. Les annonceurs y sont donc rares... et chers.

Martin Winckler, romancier à succès transformé en journaliste le temps d’une saison radiophonique écourtée, n’a pas eu le loisir de saluer une dernière fois ses auditeurs, comme le veut la tradition. L’écrivain explique : "Personne n’a fait de chronique à ma place : en passant du Gainsbourg, on a signifié délicatement aux auditeurs que j’avais purement et simplement été viré de l’antenne...". Il ajoute : "Je tiens à ce qu’on sache que l’industrie pharmaceutique peut probablement faire virer un chroniqueur scientifique d’une radio publique. Ca me paraît très, très grave."

Dès le lundi 7 juillet, la page dédiée à Winckler n’était plus accessible depuis la page des chroniques sur le site de France Inter. Et le 11 juillet à 7 h 51, l’ancien horaire d’"Odyssée", France Inter diffusait un droit de réponse du Leem. Une démarche plutôt rare dans l’audiovisuel, où l’on préfère en général régler les conflits à l’amiable (et surtout hors antenne).

Dans son communiqué, le Leem affirmait que "les affirmations erronées" lancées par Winckler "constituent des accusations sans fondements". Une belle tautologie à laquelle le Leem a préféré ne pas adosser de démonstration. Le lobby n’a pas non plus cru bon d’attaquer en diffamation Winckler ou les auteurs du "Grand secret de l’industrie pharmaceutique".

De son côté, Winckler s’apprête à publier ses chroniques à l’automne prochain aux éditions du Cherche-Midi. Il explique : "France Inter refuse de mettre son logo sur le recueil de mes chroniques (...) C’est une première. Même les chroniques de Philippe Val (rédacteur en chef de Charlie Hebdo, ndlr) ont l’imprimatur de France Inter..." Très amer, Martin Winckler souligne qu’il n’a "pas reçu un mot de soutien" de la part de membres de la rédaction de la radio publique. "Des auditeurs, en revanche, je reçois environ cent courriers d’encouragement par jour", précise-t-il.

Matthieu Auzanneau

Article disponible sur le site de transfert

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