Être un(e) adulte autiste... >
Mon histoire...
par Suki, du réseau DÉesCAa
Article du 27 avril 2012
Il était une fois... Une petite fille toute douce, toute timide, qui découvrait le monde... Un monde qui lui, lui semblait si étrange, si dur.
Elle était née avec un petit secret, qui était bien caché au creux de son esprit, et dont elle même n’avait encore aucune conscience, mais qui la guidait mystérieusement tout au long de ses expériences, tout au long des étapes cruciales de sa vie... Ce petit truc en plus, longtemps considéré comme un quelque chose en moins, allait pourtant se révéler être un atout, bien, bien plus tard dans son histoire, bien après qu’elle ait vécu des choses si complexes qu’elle même parfois, a du mal a se les remémorer avec exactitude...
Je vais vous conter l’histoire d’une petite fille semi terrienne... Une petite fille, devenue aujourd’hui une grande personne « extra terrienne », qu’on dit, aujourd’hui, aspie...
Toute petite elle a eu peur. Peur, des bruits soudains, des bruits forts... Mais s’y est très vite habituée. Elle a aujourd’hui, très peu de souvenirs d’enfances, ou alors sous forme de flashs sensoriels [1].
Elle se souvient de la cour de récréation, un peu... Des autres qui courent, partout, beaucoup, en faisant du bruit, elle n’aimait pas trop ça, elle... Elle préférait rester au calme près d’un arbre, jouer avec les feuilles, ou discuter avec une copine tout aussi peu agitée quand elle en avait une sous la main, et ca n’était pas si simple, car , elle l’avait appris très tôt ; les relations entre vrais terriens... C’est compliqué !
Elle, elle ne devait pas être tout a fait comme les autres, mais elle ne savait pas bien pourquoi, ni comment... Mais l’idée de venir d’ailleurs lui plaisait.
Comme elle était toute douce, les autres la trouvait un peu gentille... Mais un peu trop, sans doute.
Elle avait appris très tôt a tout regarder avec attention, tout examiner comme si elle avait une machine à scanner les images, et à réfléchir a ce qu’elle voyait... Et a ce a quoi cela pouvait servir... Les discussions entre camarades étaient passés sou la même « machine a comprendre. »
Il y avait un sens parfait a tout cela, tout était calculé et calculable, et elle l’a très vite compris.
Alors, pour avoir des amis et ne pas sembler venir d’une autre planète il fallait juste entrer les bons paramètres, et « faire comme si »... C’était en fait un jeu bien simple... Dont elle se servit toue sa vie.
Elle avait des moments de grande joie.
Des moments pourtant tout simples mais qui pour elle étaient intenses de l’intérieur, par exemple lorsqu’elle pouvait lire, des heures durant.
Elle entrait littéralement dans une histoire ou tout semblait si réel, si incroyable... Les personnages de ses romans préférés, les images de ses encyclopédies, vinrent animer son monde intérieur, qu’elle s’était construit a l’école, lorsque elle s’ennuyait, et cela arrivait souvent... Elle entrait alors dans un état de semi conscience, où elle retrouvait avec joie intense, amis et objets hétéroclites, ou objets d’intérêts... Sa bulle transparente.
Elle aimait marcher seule dans la campagne, aussi. Elle observait les oiseaux dans les arbres, en promenant son chien... Elle aimait énormément se balancer , sur la balançoire du jardin, et tourner, tourner... Et observer le ciel.
A ce moment de sa vie, petite extra terrienne, n’avait pas de gros soucis encore, elle savait se servir d e la « machine a faire comme si » et s’en servait fort bien.
Elle trouvait bien que tout était fort prévisible dans ce drôle de monde... Que les adultes n’étaient pas si fiables, que les échanges sentaient fort les non dits ou le mensonge larvé parfois... Elle sentait cela avec grande facilité... Mais elle même, parlait plutôt peu en présence de camarades.
« Elle est timide » disait on.
Petite fille n’aimait pas beaucoup la nourriture... Encore mois la viande, qui restait coincée dans les joues... Elle allait s’en débarrasser discrètement , ne pouvait se résoudre à avaler cette chose immonde et sans gout. Petite fille n’aimait pas du tout ça la viande... Elle aimait les animaux.
Au moins avec eux, c’était clair, et concis..
Déjà elle avait de drôles de peurs de certains lieux comme salles de sport ou piscine, avec des sensations exacerbées.
Plus tard la petite fille entra dans une drôle d’ère, où tout était fort chamboulé, l’adolescence. Elle voyait alors les autres devenir très très étranges, glousser, et se prit elle même a glousser parfois... Elle eu des émois amoureux, tout comme les camarades, et s’en ému... Mais elle avait de plus en plus du mal a se servir de sa « machine a faire comme si »... Celle ci avait elle un problème de réglage ?
À l’adolescence, petite fille était bien timide, mais cela commença a la gêner... Un peu trop.
Elle sentait comme une bulle transparente autour d’elle, dès qu’elle franchissait la porte d’une salle de classe, d’un groupe... Elle ne pouvait comme plus participer librement aux échanges, mais analysait, toujours, encore, ce qu’il fallait dire et ce qui était dit... Dans la forme et le fond...
Elle avait comme un ordinateur qui tournait a plein régime, toute la journée, dans sa tête, et savait qu’elle devait interagir beaucoup plus souvent si elle voulait s’intégrer à ces terriens, et avoir un jour un rôle a jouer parmi eux... Mais cela ne fonctionnait pas bien.
Alors petite fille se mit a penser qu’elle avait un souci, de réglage... Sa « machine a faire comme si » et a communiquer avait un souci...
Elle commença a penser quelle était... En dysfonctionnement ?
Alors que les autres vivaient de fortes expériences relationnelles, elle aussi avait cette chance car elle avait très bien appris à calquer les réactions, trop bien même, parfois... Elle se rendait compte qu’elle pouvait attraper les façon d’agir, de parler de quelqu’un qu’elle aimait bien ou admirait en quelques secondes. Et prenait des phrasés, des mimiques...
Ce qui l’aidait quelque peu a avoir une personnalité... Puisqu’il en fallait une. Surtout a cette période de la vie... Semblait il.
Les années passèrent.
Petite fille était devenue adolescente, et se perdait parmi les conventions... La bulle était toujours présente... Parfois gênante. Parfois refuge.
Elle ne se sentait pas a l’aise, parmi les attentes qu’on avait pour elle, qu’elle avait pour elle même, et elle ne s’aimait pas... Mais surtout elle ne se comprenait pas. Elle avait beaucoup de mal a comprendre comment faire pour avancer. Elle avait l’impression de vouloir communiquer, son malaise, ses difficultés, mais rien ne sortait, et personne ne voyait , par contre elle sentait un poids comme celui du jugement...
Elle faisait tout de travers, oui, mais pourquoi ? Elle ne voyait pas comment...
Et cette impression de non communication, de hurler devant une vitre épaisse... À en perdre le souffle.
Elle l’aura toute sa vie.
Petit a petit elle sombra dans une angoisse folle... De plus en plus folle... Tout ce qui semblait si naturel au monde entier lui était si complexe, si difficile a reproduire avec simplicité et lui demandait un effort conscient.
De plus sa « machine à faire comme si » semblait détraquée, elle ne pouvait plus s’en, servir, elle ne marchait plus...
Après des années de fuite en avant, elle commença a ressentir des grosses crises de panique, bien que ne sachant pas ce que cela était sur le moment, notamment lors de situations relationnelles... Puis dans des magasins, où la lumière est forte et les bruits confus, et cela, depuis toujours, elle y était très sensible, puis les lieux publics... Mais la, elle avait tout simplement du mal à le supporter. .de jour en jour les angoisses prirent le dessus, et cela allait devenir invivable, pour elle, comme pour les autres... Ne comprenant plus du tout l’extra terrienne...
À l’age de 19 ans, jeune fille allait entrer dans une ère nouvelle, celle de l’angoisse... Et pour apaiser ces angoisses, souvent situationnelles, et irrationnelles, elle avait tout essayer, des médicaments, aux bouteilles d’alcool fort, et drogues en tout genres, de préférences opiacées car elles apaisaient les angoisses... Et donnaient l’illusion de la normalité. Elle voulait faire disparaitre celle qui n’était pas comme les autres, a l’intérieur, elle voulait gommer l’extra terrienne.
Les gens autour d’elle s’étaient lassés... De ne pas comprendre.
Un jour où elle ne pouvant plus même sortir de chez elle, elle alla chez un médecin, demanda secours, mais ne pouvant exprimer avec clarté ce qui n’allait pas, car elle ne le savait pas elle même !...
Alors le médecin de campagne, ne comprenant pas bien, lui non plus, préconisa un médicament contre l’angoisse, et du repos... Mais cela ne suffisait plus... La jeune fille ne pouvait plus ni manger [2], ni sortir, tremblait, se balançait pour apaiser ses angoisses, et lorsqu’un médecin arriva un jour la trouvant dans un coin de pièce tremblante de peur comme un animal blessé... Elle demanda une hospitalisation d’urgence.
Là commença alors une période confuse.
Elle se souvenait très bien qu’une blouse est venue, lui poser des questions assez saugrenues (quel jour est on, quelle année etc..) et celle ci l’avait même fait sourire... Mais ça ne faisait pas rire du tout le monsieur en blouse. Elle eu droit a un relaxant, et dormi... Dormi... Comme si elle avait été la belle au bois dormant.
Elle avait 20 ans.
Lorsque la jeune fille émergea doucement de cette période de sommeil profond, elle commença a prendre doucement ses marques dans ce lieu qui allait devenir sa maison durant des mois, et ou elle allait avoir ses »habitudes ». Elle remarqua assez vite que toutes les pathologies étaient mélangées et que cela donnait lieu a des situations éprouvantes, des personnes âgées également en fin de vie, se trouvaient là, des personnes dépressives, alcooliques, toxicomanes, sans doute avec des troubles de la personnalité et autres schizophrénies...
Tout d’abord il fallait se rendre à l’évidence, on ne lui dirait pas ce qu’elle avait. Elle se demandait pourtant... Depuis si longtemps !... Mais lors de l’entretien hebdomadaire tant attendu des résidents, avec le psychiatre référent, rien ne venait apaiser les angoisses, ou simplement rassurer. Pas d’échanges constructifs, ni même de mots... Gentils. Uniquement des banalités froides, ou même des silences... Et lorsque elle tentait d’aborder un sujet profond, il était balayé d’un revers pour être remplacé par une pilule supplémentaire.
Elle sentait sa parole comme soumise à caution, car elle était... Malade ?
Bientôt la Belle au bois s’est enfoncée dans un univers de médicaments très forts... Neuroleptiques, anxiolytiques, antidépresseurs, et autres... Mais au moins, elle n’avait plus ou moins peur car elle ne sortait plus, et n’était plus soumise à des situations relationnelles... Ou sociales.
Et puis elle commençait a avoir pris ses marques, tout était prévu et prévisible et... Apaisant... Bien que glauque, et frustrant d’un point de vue intellectuel, de toute façon, le cerveau ne fonctionnait plus guère... Le matin elle s’éveillait avec son corps en manque tremblant... Alors elle allait telle un zombie, vers la salle de télévision ou les autres résidents attendaient la première coupelle...
Elle s’était surnommée « Gainsbart »...
Presque une année de cette vie l’a coupé du monde, peu de gens sont venus [3]... Elle avait peu de contacts avec l’extérieur, et après tout... Elle n’était plus vraiment... Elle dessinait, lisait encore... Ou allait a des sortie organisées, et avait peur de l’extérieur... Mais elle avait perdu l’étincelle.
Lors de crises identitaires, elle s’enfuyait parfois [4]. Elle errait dehors... Se liait avec les personnes de la rue et partageait les bouteilles, les drogues, et les moments d’échanges. Elle avait alors compris qu’elle était plus a l’aise avec des personnes atypiques, n’obéissant pas a des règles de vies conventionnelles... Il lui est arrivé bien des aventures et mésaventures [5]...
On a bien essayé de la sortir de là, oui...
Une personne de sa famille élargie est venue la rechercher, pour tenter l’impossible. À ce moment le psychiatre en chef l’aurait mis en garde, non, il ne fallait pas trop espérer, elle vivrait sans aucun doute le reste de sa vie dans un établissement de ce type... Une névrose d’angoisse, ou phobie sociale, ou troubles anxieux, tout en même temps, peut être... Mais en tout cas quelque chose d’irrémédiable...
Il faut admettre que l’expérience a été plutôt bénéfique, notamment sur le fait que le traitement lourd a été stoppé net, jeté a la poubelle... Un mois au moins de souffrances intérieures incroyables [6] qu’elle n’a jamais pu extérioriser. Cette tentative de sauvetage ne pouvait fonctionner pourtant, la jeune fille étant encore dans son univers incapable de communiquer de manière adaptée, et surtout, incapable de l’exprimer.
Les hôtes ont tenté, et c’est tout leur honneur, mais elle ne pouvait si facilement retrouver un équilibre, qui n’a jamais été le sien... Elle ne fonctionnait pas comme eux, et ne le savait même pas.
Elle tentait maladroitement, mais échouait lamentablement.
Agaçant au passage les hôtes méritants, qui ont mis fin à l’aventure... La remettant dehors. Ils étaient déçus, sans doute.
Elle était brisée, de n’ avoir su rattraper la chance qu’on lui tendait, parce que tout simplement elle ne pouvait pas entrer en communication. Angoissée, pétrifiée...
Une image comme toujours très négative d’elle même, on lui avait rappelé maintes fois sa fainéantise, et son incapacité à réagir, on l’avait même jaugé, les « yeux dans les yeux », pourtant si fuyants... Et rappelé qu’elle était vraiment... Déphasée... Étrange... Incompréhensible ?...
Tout ça résonnait, résonnait... Et elle est alors descendue très, très loin dans la destruction de tout cela.
C’est a dire, la destruction d’elle même, de la partie dysfonctionnelle... Un jour elle ne se réveillerait pas de ses excès, et tant mieux... Un jour, elle serait quelqu’un de bien, mais plus sur terre. Sur sa planète d’origine, peut être ?...
Elle ne comprenait résolument rien a ce qu’on attendait d’elle, à tous ces codes...
Toutes ces pirouettes verbales que l’on fait pour atteindre un but alors qu’il est si simple d’y aller tout droit. Ces sensations exacerbées, brouhaha, et discussions sans fin sur des choses sans intérêt. Beaucoup de choses la gênaient qui ne semblaient gêner quiconque elle n’osait en dire mot [7]...
Un jour ou elle avait presque touché la mort, son ami du moment , lui, mourut du même jeu commun. Alors... Elle a eu envie de voir si elle pouvait toucher la vie.
Elle rencontra un prince charmant, qui semblait plutôt équilibré, et sans addictions... Il n’en fallait pas plus... Pour changer de vie. Très vite, elle se maria et réussi, après quelques dernières semaines a l’hôpital de jour retrouvé entre temps par peur du dehors... À dire au revoir à « l’hôpital », avec force de volonté car les angoisses et incompréhensions étaient toujours là.
Mais elle voulait être « comme tout le monde ». Elle remis en marche la « machine a faire comme si »... Et plus que jamais, elle s’en servit...
Des années plus tard, notre jeune fille était devenue une Maman.
La plus jolie des aventures de sa vie, 3 fois maman, avec une joie intense, même si des moments compliquées, de situations sociales répétées, ses petits d’hommes lui donnaient, l’énergie nécessaire à tout affronter, elle se sentait enfin, presque comme tout le monde et tentait d’oublier ses tristes expériences passées, et créer des choses pour ses louveteaux.
Très vite elle a ressenti pour eux une indéfectible relation d’amour qui l’a beaucoup aidé a entrer en relation avec le reste du monde... Elle sentait toujours qu’elle était extra terrienne, mais cette fois, était décidée a devenir un peu plus terrienne pour eux.
Elle voulait être reconnue pour sa place en tant que terrienne, enfin. Et avoir ce qu’on appelle une « situation », Graal de la plupart...
Elle a dépensé son énergie... Est allée travailler... À mi-temps mais cela était déjà un exploit car elle fatiguait beaucoup. [8]
Le si peu de situations relationnelles imposées par le travail était épuisant mais elle y arrivait. Bien sur, elle était un peu étrange au travail... Ne parlait pas beaucoup, et manquait d’assurance dans les échanges... Mais qu’importe, elle travaillait !...
Elle aura un autre petit emploi par la suite, dans une université, où on finira par l’ignorer en tout point... Et ne pas même venir la saluer le dernier jour. Chose assez habituelle, elle avait quelque chose qui gêne. Elle n’a jamais eu de pot de départ, où qu’elle fut.
Les aléas de la vie suivants, elle se sépara de son prince charmant, en bonne intelligence... Et poursuivit sa route avec ses 3 petits louveteaux, tout en gardant le maximum d’énergie. Elle a même repris des études car n’ayant pas de diplôme, un bac a 32 ans, et même si les années d’université suivantes, ont été compliquées à gérer sur le plan du groupe, comme toujours, elle a pu faire 2 années de fac de documentation, domaine qu’elle aimait... À cause des livres et des archives...
Cette deuxième année d’université fut l’occasion de retrouver la bulle transparente bien en place, les groupes se suivant, et en se ressemblant pas, il fallait sans cesse remettre les réglages en place... Le malaise auprès des autres était de plus en plus lattent, et visible, et palpable... Pour finir par exploser comme toujours. Des crises d’angoisses de nouveau... Une tentative avec un psy de la fac, inutile...
L’énergie s’amenuisait un peu... Mais malgré tout, le bonheur d’avoir, comme beaucoup de gens, fait des études à la fac, était intense.
Cette même année, les enfants loups commençaient eux aussi leur aventures terrienne...
Mais ils avaient une chose que d’autres n’avaient pas ; une maman « extra terrienne ».
Alors... Et bien, a un moment, il a fallu « les montrer à un psychologue, « Madame... Oui, vous savez, ils ne s’intègrent pas... Ils sont difficile a gérer dans la classe... Avez vous des problèmes chez vous ?... »
Pour le second, puis surtout pour le dernier, la « classe » s’annonçait complexe... Il était difficilement intégré et intégrable.
La jeune maman se posa beaucoup beaucoup de question. Elle n’avait jamais rien fait qui soit plus étrange que la moyenne des mamans. Elle était étrange elle même, oui... Mais... Elle faisait tout comme les autres mamans ?
Il a fallu passer par des bilans de routine pour vérifier les probables soucis des enfants, soupçonnés hyperactifs, ou alors, précoces, toutes ces choses dont elle n’avait jamais seulement entendu parler.
Bilans effectués, le dernier en particulier s’annonça très « surdoué ». Et également très perturbé par l’ angoisse... Alors la maman, lu sur le sujet. Elle lu, des livres... Puis d’autres livres... Puis soudain, elle eu un doute.
Cela lui ressemblait tellement toutes ces descriptions, ces interrogations permanentes, ces sentiments de décalage, ces souffrances non dites... Ces fulgurances intellectuelles.
Une fois les prise en charge des petits d’homme en place, elle prit secrètement un rendez-vous chez un « psychologue » pour savoir... Était elle comme son louveteau ? Se leurrait elle ? était ce une réponse à toute cette vie en panne des autres ?
Enfin un beau matin de novembre, elle sorti de chez la psychologue avec un beau compte rendu de sa personnalité, et une confirmation d’une chose assez incroyable... Elle avait une forme élevée et atypique d’intelligence, atypique comme, environ 0, 6% de la population seulement... Était ce possible ?...
Elle qui avait passé tant de temps à se penser moins vive... Moins capable ? Mais à la fois... Qui comprenait toujours toutes les situations avant les autres et avait les solutions de manière instinctive... Sans pouvoir l’expliquer...
Une partie par contre de son bilan semblait laisser la professionnelle perplexe... Et restait sans réponse... Une hétérogénéité... Mais il restait encore beaucoup de questions en suspend.
Avec cette confirmation, elle prit la décision que cela ne changerait guère son quotidien, elle continua sa vie, avec ses enfants, qu’il fallait aider a s’intégrer, car ils semblaient avoir pris des caractéristiques de maman... Et son nouveau compagnon, Samuraï, qu’elle avait rencontré également semblant venir d’une autre planète tout comme elle. Avec lui tout était simple et sans détour. Elle aimait cela et cela l’aidait énormément.
Malgré tout restait une interrogation immense, en toile de fond...
Un jour il fallu trouver l’explication. Alors que la jeune maman avait trouvé enfin une « situation » fort appréciable, elle sentit revenir petit à petit , de grosses difficultés relationnelles, et plus le temps passait, plus la « machine a faire comme si » , qui marchait a plein régime, déraillait...
Dans son travail qu’elle aimait pourtant, trop de relationnel... Des collègues, une vie collective une hiérarchie, tellement de paramètres à mesurer, réguler, cette fois elle senti le sol s’ouvrir et se sentait glisser, doucement... La force lui manquait.
Certes pour les activités répétitives et simples elle avait été bien meilleure que les collègues, car cela faisait partie de ses aptitudes en particulier.. Mais après avoir passé un cap, il a fallu usité du téléphone tous les jour, de la pause café , d’interactions diverses... Ces moments conventionnels dans l’entreprise étaient juste devenu un cauchemar pour elle. Elle allait respirer dans les toilettes... Régulièrement, juste pour « ôter le poids » de la compensation.
Elle était en apnée toute la journée.
Les moments de repas, où toutes les collègues prenaient du plaisir à se retrouver étaient également un moment d’angoisse... Lorsqu’elle avait essayé, avant, elle avait réussi mais au pris d’efforts intenses et épuisants.
Les quiproquos et incompréhensions, avec la hiérarchie, commençaient à peser.
De nouveau elle était « bizarre », étrange... De nouveau, la bulle s’épaississait, elle ne pouvait plus interagir... Comme enfermée dans celle ci, ou alors elle s’y plongeait volontairement... Elle avait même recommencé a prendre des subterfuges chimiques de type opiacés, pour « fonctionner » le plus classiquement possible...
Elle du tenter cette fois d’aller au bout de sa démarche, comprendre pourquoi elle ne pouvait pas, être « comme les autres » malgré tous ses efforts... La machine était définitivement cassée.
Un jour elle avait vu une vidéo de Josef SCHOVANEC, un jeune homme autiste asperger.
Son discours l’avait passionné, limpide, il décrivait son quotidien, cela semblait trop beau pour être vrai, il fallait creuser, comprendre... Puis la lecture d’ouvrages sur le SA, et des témoignages... Et la dernière pièce du puzzle allait enfin être posée. !!
Une maman asperger lui a fait rencontrer une spécialiste des aspergers.
Cet entretien fut un moment clé de sa vie.
Un matin de décembre 2010, la professionnelle des TED, lui dit, comme une évidence,
vous êtes à un moment de votre vie ou vous avez 2 solutions, ou vous continuez à vous battre contre vous même, et ce que vous êtes au plus profond, et jusqu’au bout doigts, c’est à dire une « aspie » [9], et vous continuez à vouloir ressemblez aux neurotypiques que vous n’êtes pas, et au prix d’une grande énergie...
Ou, vous acceptez enfin ce que vous êtes, et vous en faite une force positive, un moteur, pour continuer à avancer.
La jeune femme extra terrienne eu a ce moment la révélation qui allait, cette fois, changer le cours de sa vie.
Elle trouva ensuite facilement des tas d’autres aspies...
Avec qui les choses furent très vite claires, oui, elle n’était pas ce qu’elle tentait d’être depuis toujours, non, elle ne pouvait pas effectuer les mêmes choses, mais pouvait en faire d’autres, car elle avait des tas de particularités. Son oreille ultra efficace, qui ne filtre pas les sons, lui donne aussi l’oreille musicale absolue. Oreille qu’elle utilisera d’ailleurs pour sa passion du violon, un intérêt spécifique chronophage de la jeune femme depuis quelques années... Qui lui sert de thérapie.
Elle ne comprenait pas pourquoi les images et les sons lui parvenaient « d’une manière particulière » et lui avait créé des crises d’angoisses si fortes à sa post adolescence... Mais aujourd’hui elle savait. Elle perçoit les choses différemment !!
Elle n’est pas un monstre...
Elle a bien sur des amis, peu mais, neurotypiques ou aspis, c’est égal si on s’accepte tel que l’on est. De plus, elle comprenait enfin son empathie spécifique, moindre dans certains cas extrêmes, comme « verrouillée » mais existante, bien sur, d’une autre manière... Le fait qu’elle n’avait jamais été attirée par les choses de « vraies filles »... La mode... Et tout, enfin...
Elle a une mémoire phénoménale [10], et le fait d’être surdouée lui a tout simplement « camouflé » le syndrome d’asperger toute sa vie ou presque, au prix d’immenses efforts de surcompensation pour ne pas surtout pas être différente... L’hétérogénéité du bilan de QI montrait en fait un profil typiquement asperger... Ce que seule la seconde professionnelle a su mettre en évidence [11].
Elle a pu comprendre ses balancements réguliers qui la calment, ses tics, ses besoins de certains rituels apaisants... Ainsi que ceux du petit dernier. Tout ce contre quoi elle se battait, pour le cacher, aujourd’hui elle l’accepte et respecte son rythme personnel. Aujourd’hui elle s’accepte autiste asperger, avec les traits visibles...
Alors... Bien sur, cette maman asperger, aujourd’hui, elle se sent mieux, elle a su redemander une reconnaissance de travailleur handicapé, et trouver son mode de fonctionnement, pas si « étrange » en fait, puisque d’autres l’ont... Elle s’occupe de sa tribu atypique, ses louveteaux sont eux aussi peu conventionnels mais s’en sortent très bien... Elle a su voir chez son Samuraï, les traits du SA également [12].
Mais elle garde en mémoire les diverses mésaventures qui lui sont arrivées, par méconnaissance de ce syndrome, par méfiance toute simple de la différence à peine perceptible, [13]
Entre temps cette maman a aussi appris que beaucoup de gens célèbres et même importants, dans l’aventure humaine, étaient et sont asperger, et qu’au contraire aujourd’hui, on peut avancer avec ce mode de fonctionnement sans rougir... Être Extra-terrien, c’est être quelqu’un de bien... La planète est assez grande pour nous tous. ;-)
Mais le prix a été fort.
Alors elle veut parler aujourd’hui, et surtout, éviter à d’autres aspis d’être traité comme des malades dans les hôpitaux psychiatriques... Qui n’est pas leur place...
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Merci de m’avoir lue ! :-)La semaine prochaine... Une petite tranche de la vie quotidienne de SukiUne journée à la libraire
[1] odeurs, images, et musiques, et quelques sensations...
[2] elle mangeait très peu depuis toujours mais avait beaucoup perdu...
[3] Elle est folle !!...vous vous rendez compte, elle est dans un hôpital psychiatrique...
[4] Comme a ses 17 ans, ou elle avait fugué, se fuyant elle même
[5] qu’un jour elle écrirait en détails...
[6] déréalisation, mal être profond, elle aurait pu faire un delirium tremens.
[7] des sons, des sensations, des situations..
[8] entre temps, via l’hôpital, on lui avait octroyé, une reconnaissance de travailleur handicapé et une carte d’invalidité et une allocation... Mais elle la refusera quelque temps plus tard... Par envie de ne plus être « anormale »...
[10] cf surdon mais pas seulement
[11] ainsi que divers échelles autistiques
[12] il avait un parcours plutôt typique SA...
[13] il lui était arrivée de hurler intérieurement qu’elle préfèrerait avoir un bras en moins... Pour être acceptée, et pas cette drôle de chose à l’intérieur, qu’elle ne comprenait pas... Et qui faisait si peur aux autres !
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