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Les enfants qui cherchent à soigner leurs parents...
Texte de la chronique d’ArteRadio.com
Article du 16 mars 2005

Ecoutez la chronique sur ArteRadio.com


Pendant longtemps, en France, on a cru que les enfants qui souffraient, c’étaient les enfants qui criaient.

Alors quand un enfant criait, on le soulageait, quand un enfant ne criait pas et se repliait sur lui-même, on disait "il ne souffre pas". On a découvert que c’était très différent, la manière de souffrir des enfants et de réagir à la souffrance est très différente, c’est que les enfants qui souffrent d’une douleur physique ont justement tendance à se replier sur eux-mêmes, et quand on leur donne de la morphine, ils se rouvrent au monde, ils se remettent à jouer. Donc un enfant replié sur lui est un enfant qui souffre. Ce n’est pas un enfant qui n’a besoin de rien, au contraire. Ça, c’est jusqu’à 6, 7 ans, 8 ans. Après, il dit qu’il souffre.

Mais il y a différentes manières de souffrir, il y a la douleur physique que l’enfant éprouve, et puis il peut aussi y avoir des douleurs morales. Et une douleur à laquelle on ne fait pas toujours attention, c’est l’enfant qui ressent la douleur, non pas qui lui est infligée à lui, moralement ou physiquement, mais la douleur de ses parents. Je pense que les enfants qui ont des parents qui souffrent, évidemment souffrent aussi, parce qu’ils sont extrêmement proches d’eux, et comme ils souffrent aussi de la souffrance de leurs parents, comme ils la ressentent, ils cherchent à les aider. Et on voit très souvent autour de soi, quand on ne se sent pas bien, on voit souvent ses propres enfants venir vers vous et dire "comment ça va ? Est-ce que tu veux que je fasse quelque chose ?", en particulier des enfants qui ne sont pas d’habitude très très attentionnés, apparemment, qui s’occupent surtout d’eux-mêmes, quand ils voient que leurs parents sont repliés sur eux et ne vont pas très bien, ils viennent vers eux. Surtout quand ils ont eux-mêmes des parents qui sont d’habitude soignants et qui les aident, qui les accompagnent, qui ne sont pas des parents qui maltraitent, mais des parents qui s’occupent d’eux, qui les élèvent, qui les soutiennent.

Par exemple, Françoise Dolto décrivait un phénomène extrêmement fréquent chez les jeunes mamans dépressives, c’est que les jeunes mamans dépressives juste après l’accouchement ou pendant les mois qui suivent l’accouchement ont des nourrissons qui sont agités. Elle disait "le nourrisson n’est pas agité parce que sa mère est dépressive, le nourrisson est agité parce qu’il essaie de remonter le moral de sa mère. Il essaie de la stimuler parce qu’il sent que sa mère est dépressive." Et quand on soigne la dépression de la mère, le nourrisson se calme, parce qu’il sent que sa mère n’est plus dépressive, et il n’est plus agité. C’est donc une manière très originale et très intéressante de voir les choses, puisque ça consiste à dire : ce n’est pas la mère qui est responsable de l’état de mal-être de l’enfant, mais l’enfant, sentant le mal-être de sa mère, essaie d’y faire quelque chose qui n’est pas approprié, parce qu’on ne remonte pas le moral d’un dépressif en le stimulant, mais il essaie d’avoir un comportement soignant en retour du comportement de soin qu’il a reçu de sa mère.

Je disais tout à l’heure que le fait pour un enfant d’aider était relativement naturel, à mon avis, surtout pour un enfant qui a l’habitude d’être lui-même aidé et soigné, et je pense que souvent les enfants ont tendance à faire de leur vie quelque chose en fonction des souffrances qu’ils ont senties autour d’eux, même si ces souffrances n’ont pas été physiques mais symboliques. Parce que quand on est enfant, on se sent extrêmement impuissant face à la souffrance des autres, et en grandissant, de manière peut-être extrêmement inconsciente, on cherche à acquérir des outils qui vont nous aider à soigner symboliquement les gens qu’on a senti souffrir. Alors ça peut être par exemple devenir instituteur parce qu’on a été élevé par des gens qui n’avaient pas fait d’études, qui ne savaient pas lire, qui ne savaient pas écrire, et du coup on enseigne à lire et à écrire à des enfants.

Ça peut être, comme l’explique Marie Nimier dans son livre La Reine du Silence, ça peut être comme le frère de Marie Nimier, devenir réanimateur parce que son père est mort dans un accident de voiture, et que en tant qu’urgentiste, il attend de soigner son père arrivant de son accident.

Et puis ça peut être aussi d’apprendre à devenir écrivain pour donner la parole à ceux qui n’ont jamais pu parler, et qu’on a senti souffrir du silence.

Ecoutez la chronique sur ArteRadio.com

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