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Féminisme et publicité
L’Esprit d’Escalier de Mona Chollet, ép. 5
Article du 12 février 2006

Elisabeth Badinter l’avait déjà dit l’année dernière dans son livre Fausse route : l’image de la femme dans la publicité, ce n’est vraiment pas grave. Et les féministes qui protestent contre ça ne sont que des bourgeoises désoeuvrées ou des hystériques endoctrinées, fourvoyées dans des combats d’arrière-garde.

Aujourd’hui, c’est la directrice de la rédaction du magazine Elle, Valérie Toranian, qui en remet une couche dans le livre qu’elle vient de publier, Pour en finir avec la femme. Un livre étonnant : quatre-vingt dix pages seulement, mais un gisement de perles absolument inépuisable. C’est un peu « Badinter pour les nuls », si vous voulez. Elle explique qu’on ne peut pas protester contre l’utilisation de la femme dans la publicité, parce que sinon, je cite, « et nos amies les bêtes ? Pourquoi la SPA ne les protégerait-elle pas des instincts carnassiers du marketing animalier » ? Surtout que, de toute façon, elle a sa petite idée - je cite encore : « On voit bien que la question n’est pas là. Ce qui gêne certains, c’est la femme dans la représentation ou la suggestion érotique. Le désir de la femme est-il donc toujours aussi subversif ? Ne continue-t-il pas de gêner ? »

Ecouter la chronique sur le site d’ArteRadio

Ah, d’accord... Ça y est, j’ai enfin compris, par exemple, pourquoi tellement de femmes sont énervées par une publicité comme Aubade. Vous savez, la publicité pour la lingerie où on voit une femme en culotte et soutien-gorge affriolants, avec des slogans comme : « Leçon numéro 21 : prendre un air lointain », « leçon numéro 35 : simuler la timidité »... Eh bien, si cette pub est énervante, c’est parce que cette femme, elle exprime du désir... Comment est-ce que j’ai pu ne pas le comprendre plus tôt ? Bon, j’avais quand même des excuses, parce qu’il faut dire que le mannequin est cadré sans la tête, la photo s’arrête en haut du cou, alors pour savoir ce qu’elle exprime, ce n’est pas évident.

Eh bien oui, on s’en fout, du visage : c’est une publicité pour de la lingerie, pas pour une crème antirides.... Enfin. Heureusement que Valérie Toranian est là pour m’expliquer ce qu’il y a de « subversif » dans les fantasmes des beaufs bronzés qui imaginent ce genre de campagnes, parce que sinon, je crois que ça aurait pu m’échapper encore longtemps.

Bien sûr, il ne faut voir aucun lien entre le fait qu’elle donne sa bénédiction à l’utilisation de la femme dans la publicité et le fait qu’elle est directrice de la rédaction d’un magazine qui vit de la publicité. De même que, dans le cas d’Elisabeth Badinter, il n’y a aucun lien avec le fait que la philosophe est par ailleurs actionnaire principale et présidente du conseil de surveillance de Publicis, quatrième groupe mondial de publicité. Publicis qui s’est par exemple chargé de la campagne d’une autre marque de lingerie, Barbara, avec des slogans aussi fins et spirituels que : «  quand on me dit non, j’enlève mon pull  », ou : « mon banquier me préfère à découvert  ». (C’est la journaliste Marie Bénilde qui relevait ce cumul des casquettes, dans un article du Monde diplomatique, en juin dernier.) Que ces dames défendent leur business, très bien. Par contre, il me semble qu’il faut être un peu dingue pour leur accorder la moindre légitimité à parler de féminisme, et encore moins à dire aux féministes si elles font « fausse route » ou non.

Vous avez peut-être vu ou entendu parler de cette excellente série américaine diffusée depuis peu en France, « Nip/Tuck », dont les héros sont deux chirurgiens esthétiques de Miami - tiens, il faudrait que je demande à Martin Winckler ce qu’il en pense... On y voit, par exemple, une jeune femme très grosse, qui veut se faire opérer pour maigrir avant la soirée des anciens élèves de son lycée. Elle a appris que l’ancien playboy de sa classe venait de divorcer, et elle espère attirer enfin son attention. Elle vit dans un appartement dont les murs sont tapissés de photos de mannequins et de publicités découpées dans les magazines. Finalement, comme son chirurgien est en pleine crise d’éthique, il annule l’opération quelques jours avant, en lui disant qu’elle en attend trop. Et, effectivement, elle devait en attendre beaucoup, parce qu’elle se tire une balle dans la bouche, et on voit le sang gicler sur les photos de mannequins affichées au mur.

Cette image, je voudrais la dédier aimablement, pour finir, à Valérie Toranian et à Elisabeth Badinter.

Ecouter la chronique sur le site d’ArteRadio

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