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Chroniques carabines

Scarabée est étudiante en médecine à Paris, elle nous fait l’amitié de partager ici une partie de ses carnets. (Et oui, c’est bien une étudiante, et son pseudonyme ne cache pas une personnalité connue...)



Chroniques carabines, 14
Trainspotting
par SCARABEE - 9 décembre 2010

Choisis la vie. Laisse-toi terroriser sur tes perspectives d’avenir, balaie d’un coup d’oeil les propositions de carrière qui s’offrent à toi, le chômage fatalement au bout, les voies sans issue, le quotidien sans passion, la feuille Excel à perpétuité, le devoir de subordination. Souffre pour des mecs qui ne te regardent pas, passe tes samedis la tête dans la cuvette à te demander si c’est toi ou si c’est les autres ; fais-toi remarquer, fonds-toi dans la masse. Roule ton pétard sous la paillasse de la salle de TP de chimie pendant que ton voisin glisse une paire de ciseaux dans une prise pour faire sauter les plombs. La plupart de ceux qui se taisent n’éprouvent pas grand-chose ; ceux qui parlent trop, surtout de leurs émotions, fatiguent leurs congénères. Persévère avec l’alcool, c’est une question d’entraînement. Ta soupape, c’est samedi soir, et pas avant, fourre-toi bien ça dans le crâne. Triche sur ton âge pour rentrer en boîte. Tu fais beaucoup plus que tes 13 ans. Mets-toi une cuite. Ce matin, ton mec t’a dit qu’on l’appelait « le pédophile ».

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Chroniques carabines, 13
L’ennui guette
par Scarabée - 2 décembre 2010

Mes premiers souvenirs d’enfance sont des souvenirs d’ennui. Du plus profond de ma mémoire, dès mes 3 ou 4 ans, peut-être même avant, je me suis fait suer à n’en plus pouvoir. A la maternelle, on nous obligeait à faire la sieste dans un grand dortoir dont le plafond était recouvert de dalles de polystyrène carrées. Aucun moyen d’y déroger, tout le monde devait dormir. Mais moi, je gardais les yeux grands ouverts, incapable de dormir en journée. Alors je comptais les dalles du plafond, inlassablement. J’éprouvais déjà ce sentiment de panique devant la vacuité des activités que l’on me proposait.

J’étais une véritable télévore, plus par dépit que par véritable intérêt. Tout y passait : la politique, les émissions de variété, les jeux olympiques,les dessins animés ; mais je n’étais pas dupe. Je me rappelle très bien la lassitude qui s’emparait de moi devant Candy, que je ne pouvais pourtant m’empêcher de regarder, faute de mieux. "Oh non, encore..." pensais-je dès les premières notes du générique. Mais je restais plantée là, dans mon petit fauteuil.

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Chroniques Carabines,12
Odeurs
par Scarabée - 23 novembre 2010

A l’hôpital, on ne voit pas toujours grand-chose, notamment quand on choisit de se mettre des oeillères.

A l’hôpital, on ne goutte plus les urines, et on ne profite guère des arômes de la bonne chère sur ces plateaux au contenu insipide.

A l’hôpital, on touche assez rarement hormis quelques brefs moments de furie palpatoire.

Restent le bruit et l’odeur, pas cantonnés aux discours de Chirac qui, du temps de sa splendeur, en flattait le facho dans les assemblées paillardes du RPR. Les seuls stimuli sensoriels que personne ne peut fuir bien longtemps. Ils vous poursuivent, vous collent aux tympans, tapissent vos narines, au point que souvent, à la bibliothèque, j’en suis encore imprégnée.

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Chroniques carabines, 11
Au secours, j’aime la chir !
par Scarabée - 3 novembre 2010

Incroyable. Je ne sais pas quoi dire de plus ébouriffant. Moi qui vous abreuve depuis des semaines de vigoureuses diatribes sur la beauté de la relation médecin-patient, blablabla, j’en passe et des meilleures...voilà que je suis en train d’en pincer pour la chir orthopédique. Les gros clous, la scie et la perceuse, et puis les tripatouillages de plaies, les sutures de tendons, l’ambiance si particulière du bloc, les staff-éclairs, les gens...c’est un monde à part.

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Chroniques Carabines, 10
"Génération de chochottes"
par Scarabée - 24 octobre 2010

L’externe ouvre péniblement un oeil à 6h du matin. Il fait nuit noire. Il s’ébroue, se traîne hors du lit, se rend dans la salle de bains. Il prend une douche chaude qui le console un peu du froid qui règne dans l’appartement. Il se sèche et surprend dans le miroir un visage blafard aux yeux cernés. Il ouvre le placard ; le choix est difficile. Froid dehors, trop chaud dans les services, en pyjama de non-tissé au bloc ; son style vestimentaire dépend des tâches qui lui incombent cette semaine. Il enfile ses fringues, se fait couler un café, grignote un truc, fume une cigarette, fait son sac en vidant la moitié de ses polycopiés dedans, au cas où il se sentirait dans une forme olympique en sortant de stage. 6H50 déjà, il est temps de vider les lieux. Un soupir, deux tours de clés, et c’est parti.

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Chroniques Carabines, 9
Fini de rire
par Scarabée - 28 septembre 2010

C’est la rentrée...désolée pour le retard. J’ai commencé il y a deux jours une nouvelle année, un nouveau stage, de nouvelles emmerdes administratives, alors que je ne m’étais même pas encore remise de mon été (trop) mouvementé. Et après deux tout petits jours, mon pauvre esprit malade se remet à faire les montagnes russes, incapable de jongler entre mes émotions envahissantes et mon petit quotidien merdique : lever à 5h45, douche, fringues, maquillage, clope, thé, clope, premier métro, deuxième métro, marche, hôpital, staff, consultation d’ortho pendant 4 heures, sortie 13h, pas faim, clope, coca, clope, cours ou apprendre les cours (ou pas), retour maison, envie de rien faire, de rester plantée là bras ballants, cervelle vide, regard morne, bouffe compulsive, télé pas mieux, au dodo, rebelote. Fait chier ! Où caser du sentiment là-dedans ? J’ai l’impression d’être morte à l’intérieur. JE VOUDRAIS être morte à l’intérieur. Si y’avait des cours pour ça à la Mairie de Paris, j’irais réserver ma place plus vite que pour un concert de David Bowie. Mais y’en a pas, et ma carapace est toujours aussi molle. Ca met combien de temps à durcir, bordel ? On dirait que ça finit tout de même par arriver tôt ou tard. Tiens bon la barre, Scarabée. La preuve en histoire :

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Chroniques Carabines, 8
Douleurs physiques, douleurs morales
par Scarabée - 17 septembre 2010

Qu’y a-t-il de pire dans la vie, la souffrance physique ou la souffrance morale ? L’angoisse qui vous étouffe comme un boa s’enroulant autour de votre cage thoracique, qui vous étreint jusqu’à en crever, les attentes toujours déçues, l’espoir qui s’amenuit de jour en jour jusqu’à ce que vous ne soyez plus qu’une misérable loque ? Ou la douleur dans vos entrailles, vos membres, le crabe qui vous enserre progressivement les voies respiratoires et vous fait suffoquer au point de vous empêcher de courir, puis de marcher, puis de faire votre toilette et de manger seul ? La honte, la culpabilité, le sentiment d’échec, le dégoût de soi et des autres, l’envie d’en crever, ou la sensation terriblement concrète de vraiment crever, impuissant et réduit à un légume tout juste parlant, sans que vous puissiez rien faire ?

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Chroniques carabines, 7
Merci la vie
par Scarabée - 8 septembre 2010

Je vous fous les glandes, d’habitude, hein ? L’hôpital froid et terne et moche, les patients au plus mal auxquels personne ne se soucie d’apporter la moindre petite étincelle de « youpi » ; le personnel médical désabusé, fatigué, tendu, égoïste, maladroit, méchant, ignorant, nombriliste ; les externes qui prennent le même chemin que leurs aînés, par facilité ou par inclinaison naturelle...

Vous en avez plein le dos de m’entendre geindre ? Moi aussi ! Alors aujourd’hui, quelques mots en l’honneur de ceux qui m’ont fait marrer, qui m’ont aidé à porter le poids de la souffrance, à tous ceux qui font qu’on n’abandonne pas le navire en se jetant par-dessus bord.

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Chroniques Carabines, 6
Il n’y a pas d’amour
par Scarabée - 2 septembre 2010

Il n’y a pas d’amour. Certains adultes y croient encore, surtout des femmes seules qui pensent pouvoir partager cette sensation avec un autre être humain et finissent généralement par opter pour un chien de petite taille. Les autres se sont pris tellement de gamelles qu’ils songent sérieusement à raccrocher les gants. Souvenez-vous, vos vies n’ont pas toujours été aussi moches. A l’adolescence par exemple, lorsque vous étiez naïfs mais pas encore rances.

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Chroniques carabines, 5
La grande garde
par Scarabée - 19 août 2010

On dirait que tu pars en colo. En tout cas, ton paquetage a l’air prévu pour : le pique-nique, la flotte, une trousse de toilette, des bouquins, une serviette, un paquet de clopes tout neuf. Sauf qu’en colonie de vacances, le plus souvent, on n’emmène ni son stéthoscope ni son marteau à réflexes. D’ailleurs, tu ne pars pas en colo, mais en grande garde de neurochirurgie. De 8h à 8h du matin. Tes premières 24 heures au travail sans dormir ou presque. C’est excitant, et terriblement flippant aussi. Les médisants sifflent qu’il s’agit simplement de répondre au téléphone, mais pour une fois tu vas vraiment servir à quelque chose. En tout cas, tu veux voir par toi-même. Et c’est pour cela que tu te retrouves assise sur ce muret, un samedi, à l’heure où blanchit la campagne. Tu regardes autour de toi. A cette heure, sans âme qui vive, l’hôpital ressemble à un décor de studio, avec ses pelouses bien tondues, ses haies bien taillées, ses rues pavées. Une ambiance à la Truman show. Tu t’attends presque à ce qu’un projecteur s’écrase à tes pieds. Mais rien ne se passe. Alors tu balances ton mégot, tu hisses ton sac sur ton épaule, et tu descends la rampe d’accès.

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