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En France, quand ils ne refusent pas carrément de poser des DIU, beaucoup de gynécologues posent le moins efficace ! ! ! ! !

6 mars 2006

Que diriez-vous si on vous refusait une pilule sans raison valable, ou si on vous en imposait une sans vous dire qu’elle est moins efficace que les autres ? Que diriez-vous si, en cas d’échec, on laissait entendre que toutes les pilules se valent, et qu’il ne faut compter sur aucune pour assurer votre contraception ?

Vous ne voudriez probablement plus utiliser de contraception orale. Vous vous sentiriez démunie et en colère.

Or, c’est exactement ce que de nombreux gynécologues imposent aux femmes qui désirent opter pour un DIU (dispositif intra-utérin ou « stérilet »). À l’heure actuelle, ces femmes sont exposées à une double menace par de nombreux gynécologues :
 celle de se voir exposées à une grossesse non désirée par refus de prescription d’un DIU ;
 celle d’être exposées à une grossesse - non désirée et à risque - par la prescription du DIU le moins efficace commercialisé en France.

L’article qui suit décrit ces deux menaces inacceptables et explique que les gynécologues français qui exposent leurs patientes à ces risques enfreignent sans vergogne la loi et le code de déontologie.

Martin Winckler




Le DIU : méthode encore trop souvent refusée sans raison valable

La première est de se voir refuser cette méthode contraceptive efficace sous prétexte qu’elle serait dangereuse, en particulier pour les femmes n’ayant jamais eu d’enfant ; or, comme les directives officielles de l’ANAES l’indiquaient déjà fin 2004, le DIU est une méthode de première intention : il peut être proposé comme première contraception (et donc, avant toute grossesse) ; la FDA (agence du médicament américaine) a même récemment indiqué aux médecins des Etats-Unis qu’il était licite de proposer un DIU à toutes les femmes âgées de plus de 16 ans...

Au centre d’IVG et au centre de planification du CH du Mans (72) où je travaille depuis 23 ans, je reçois chaque semaine des femmes de tous les âges à qui on a refusé un DIU sans raison valable et qui ont dû en passer par une IVG ou une grossesse menée à terme pour obtenir la contraception qu’elles voulaient.

Régulièrement, dans les boîtes à lettre de ce site, je reçois des messages de femmes de toute la France me confiant que leur gynéco (homme ou femme) refuse catégoriquement de leur poser un DIU sous prétexte qu’elles sont « trop jeunes et n’ont pas d’enfant », « que ça leur fait courir des risques d’infections », etc.

Cette violence doit cesser. Les données scientifiques actuelles sont claires : le DIU est une contraception fiable, dénuée d’effets secondaires graves ou mortels (ce qui n’est pas le cas des pilules contenant des estrogènes, méthode la plus prescrite en France) et il peut être posé sans problème à l’immense majorité des femmes qui en font la demande. Il ne compromet pas la fertilité, n’augmente pas le nombre de grossesses extra-utérines, et toutes les horreurs qu’on raconte à son sujet sont fausses. De plus, un DIU est toujours plus efficace qu’une pilule = des enquêtes ont montré que les grossesses par échec de pilule sont 2,5 plus nombreuses que le grossesses par échec de DIU.

Ces affirmations ne sont pas de mon invention. Elles sont le fruit des consensus internationaux sur le sujet. Vous pouvez le vérifier en visitant en particulier les liens suivants :

 sur la sécurité d’emploi du DIU et son utilisation par les femmes n’ayant pas d’enfant
Le document officiel de l’ANAES
Le document de l’IFFP (Association internationale des centres de planification

 sur la fréquence comparée des échecs de DIU et de la pilule : le compte-rendu de l’enquête de Bajos et coll.


Deux formes de DIU, d’une grande efficacité

 Le DIU hormonal Mirena est un dispositif de grande efficacité, qui apporte de plus un grand confort aux femmes ayant spontanément des règles abondantes et douloureuses. Il est aussi utilisé comme thérapeutique pour traiter de petits fibromes et l’endométriose. Si son intérêt n’est plus à démontrer, ce DIU hormonal ne convient pas à toutes les femmes, car il modifie le profil des règles (jusqu’à en empêcher la survenue) et peut avoir des effets secondaires (poussées d’acné, prise de poids). Il ne devrait dont pas être d’utilisation systématique car son efficacité n’est pas sensiblement différente de celle des DIU au cuivre.
Son efficacité repose essentiellement sur le fait que l’hormone qu’il contient, un progestatif, épaissit les sécrétions du col (l’orifice) de l’utérus et empêche le passage des spermatozoïdes. C’est une méthode « barrière ».

 Les DIU au cuivre sont aussi des méthodes contraceptives très efficaces. Leur efficacité contraceptive résulte du fait que le cuivre inactive les spermatozoïdes. C’est donc une méthode spermicide. . [1] Ils respectent le cycle naturel : l’utilisatrice a des règles avec la même régularité que si elle n’avait aucune contraception. Les effets secondaires se limitent à allonger un peu la durée des règles chez un petit nombre de femmes.

Les deux types de DIU ont une efficacité comparable (moins de 1% d’échecs). Le choix entre DIU hormonal/DIU au cuivre doit donc être fait par la femme, en fonction des caractéristiques respectives de chaque type de DIU, et du confort qu’elle en attend. Le DIU ne devrait jamais être imposé par le médecin ! ! ! Mais pour qu’une femme puisse choisir, il faut lui délivrer l’information....


Quatre DIU au cuivre disponibles en France, dont un qui aurait dû être retiré du marché !

L’efficacité d’un DIU au cuivre est essentiellement proportionnelle à la surface de cuivre qu’il porte. Le DIU de référence dans le monde est le TCu 380, un DIU en forme de « T » qui porte du cuivre sur chacune de ses branches. Un clone de ce DIU existe en France, sous le nom de TT 380. Il est si efficace que la notice précise qu’il peut rester en place 10 ans... (Aux USA, la notice indique qu’il peut être laissé en place 12 ans.). Son efficacité a été mesurée. Le nombre de grossesses au bout de 1 ans pour 100 utilisatrices est de 0,5% - contre 2 à 15 % pour une pilule qu’on peut oublier, vomir, arrêter parce qu’on ne la tolère pas, ou dont l’efficacité peut être compromise par un autre médicament.

En France, il existe quatre types de DIU au cuivre
 le TT 380
 le UT 380 (en deux tailles : standard, et « short » pour les femmes n’ayant pas eu d’enfant)
 le MLCu 375 et son générique le Gynelle 375 (en deux tailles également)
 le Nova T 220.

De l’avis de tous les documents internationaux de la contraception, le Nova T 220 est le DIU actuellement disponible le moins efficace. En effet la surface de cuivre n’en est que de 220 mm² (contre 375 ou 380 pour les autres), ce qui compromet son efficacité et explique que la fréquence des grossesses sur Nova T atteigne, d’après une étude de l’OMS, 6 % au bout de 3 ans d’utilisation.

Dans de nombreux pays - en particulier en Angleterre, dont les médecins sont en pointe de la résistance à la désinformation de l’industrie pharmaceutique - les gynécologues ont cessé d’utiliser le Nova T et demandé son retrait. Il est en effet non-éthique d’imposer à une patiente une méthode thérapeutique (ou, ici, contraceptive) dont l’efficacité est notoirement inférieure aux autres. En Angleterre et dans de nombreux pays du monde, le Nova T 220 a donc été retiré du marché et le fabriquant, Schering, l’a remplacé par un Nova T 380, porteur d’une surface de cuivre presque deux fois supérieure.

Curieusement, cette mesure élémentaire pour la sécurité des femmes n’a pas été prise par le fabriquant en France, où le Nova T 220 continue à être commercialisé sans information par le laboratoire, et posé par de nombreux gynécologues.

De plus, contrairement à leurs confrères britanniques ou hollandais, qui ont depuis longtemps appelé à ne plus utiliser le Nova T, les gynécologues français semblent ne faire aucune distinction entre les différents DIU au cuivre. Dans de nombreuses régions de France, le Nova T 220 est le DIU au cuivre le plus prescrit et le plus posé... avec des conséquences graves pour les femmes.

NOTE IMPORTANTE : Toutes ces affirmations ne sont pas de mon cru. Elles sont le produit des consensus internationaux sur le sujet. Vous pouvez le vérifier en visitant en particulier les liens suivants :

 sur l’efficacité comparée des DIU
 sur l’abandon du Nova T 200 en Angleterre (en anglais)
 sur l’abandon du Nova T 200 aux Pays-Bas (en anglais, note 5)


En dehors des situations de contraception d’urgence, il n’y a aucune raison, aujourd’hui d’utiliser un Nova T 220  :

 il est nettement moins efficace que les autres DIU au cuivre ou le DIU hormonal Mirena (2% d’échecs la première année, 6% au-delà de 3 ans, contre moins de 1 %
 il n’est pas plus facile à poser (le UT 380 a exactement la même forme, ainsi qu’une taille « short » qui convient aux femmes n’ayant pas eu d’enfant)
 il est plus cher !

À mon humble avis, la seule situation où on peut être amené à poser un Nova T est la situation de contraception d’urgence dans laquelle où une femme demande la pose d’un DIU plusieurs jours après un rapport sexuel non protégé, et où le médecin ne dispose que de ce modèle-là ! ! ! Et même dans ce cas rare, il me paraît raisonnable et souhaitable d’avertir la patiente des limites du Nova T et de le remplacer ensuite dès que possible par un autre dispositif.


L’efficacité des différents DIU revêt une grande importance pour la sécurité des femmes .

L’une des principales objections à l’utilisation d’un DIU par de nombreuses femmes est l’idée selon laquelle le DIU est une contraception inefficace.

Or, l’efficacité des DIU de référence (DIU hormonal, DIU avec 380 mm² de cuivre) est plus grande que celle des pilules contraceptives.

Quand un modèle de voiture est source d’accidents, ses ventes chutent, mais toutes les marques et tous les modèles du constructeur ne sont pas abandonnés pour autant.

Mais beaucoup d’utilisatrices potentielles de DIU refusent cette contraception parce qu’elles connaissent des femmes qui ont été enceintes avec un DIU. Or, les grossesses avec DIU sont deux fois moins fréquentes que les grossesses avec pilule, ce que les gynécologues expliquent rarement. De plus - j’ai pu le constater au centre de planification où je travaille, et où l’un de nous relevait systématiquement le type de DIU concerné - 8 fois sur 10, les grossesses sur DIU concernent des femmes porteuses d’un Nova T. Il est logique qu’une femme ayant été enceinte avec un Nova T 200 ait le plus grand mal à accepter d’essayer un autre DIU... et en dissuade les autres utiisatrices potentielles.

Par conséquent, le Nova T 200 est doublement nocif : il fait courir des risques injustifiés à ses utilisatrices ; il dissuade des utilisatrices potentielles de recourir au DIU, alors que la méthode leur conviendrait parfaitement.

En supprimant le Nova T 200, on diminuera les grossesses sur DIU et on permettra à un plus grand nombre d’utilisatrices potentielles d’avoir recours au DIU avec une plus grande sécurité (et , pour beaucoup, un plus grand confort) qu’avec la pilule.

Mais pour supprimer le Nova T 200, il faut que les gynécologues français
- 1° cessent de le prescrire

- 2° exigent du laboratoire qu’il le retire du marché ou qu’il le remplace par un DIU portant 380 mm² de cuivre, comme il l’a fait dans d’autres pays du monde (voir plus haut).


Les gynécologues qui refusent de prescrire un DIU sans raison valable ou imposent un Nova T 200 à leurs patientes enfreignent la loi et le code de déontologie.

En France, le code de déontologie médicale énonce, entre autres, plusieurs règles très précises :

 Tout médecin doit entretenir et perfectionner ses connaissances ; il doit prendre toutes dispositions nécessaires pour participer à des actions de formation continue. (Article 11 et article R.4127-11 du code de la santé publique)

Autrement dit : un gynécologue doit se tenir au courant des progrès et des connaissances concernant sa spécialité... S’il ne sait pas que le Nova T 220 est moins efficace que les autres, il est en faute.

 Dès lors qu’il a accepté de répondre à une demande, le médecin s’engage à assurer personnellement au patient des soins consciencieux, dévoués et fondés sur les données acquises de la science, en faisant appel, s’il y a lieu, à l’aide de tiers compétents. (Article 32 et article R.4127-32 du code de la santé publique)

Autrement dit : un gynécologue doit respecter les données avérées de la science au moment où il exerce. S’il prescrit et pose un Nova T 220 alors que d’autres DIU plus efficaces existent, il est en faute.

 Le médecin doit à la personne qu’il examine, qu’il soigne ou qu’il conseille une information loyale, claire et appropriée sur son état, les investigations et les soins qu’il lui propose. (Article 35 et article R.4127-35 du code de la santé publique)

Autrement dit : un gynécologue qui n’informe pas loyalement la patiente sur les différentes méthodes de contraception (c’est à dire en lui expliquant les données scientifiques actuelles) est en faute.

 Le consentement de la personne examinée ou soignée doit être recherché dans tous les cas. (Article 36 et article R.4127-36 du code de la santé publique)

Autrement dit : un médecin ne peut pas prescrire à une femme une contraception dont elle ne veut pas. Un gynécologue qui refuse de poser un DIU alors que rien ne s’y oppose, ou qui impose l’utilisation d’un DIU non efficace dont la patiente ne veut pas est en faute.

 Le médecin doit s’interdire, dans les investigations et interventions qu’il pratique comme dans les thérapeutiques qu’il prescrit, de faire courir au patient un risque injustifié. (Article 40 et article R.4127-40 du code de la santé publique).

Autrement dit :
 un gynécoloque qui refuse un DIU à une femme sans raison scientifique ou médicale valable et lui prescrit une contraception dont elle ne veut pas (et qu’elle n’utilisera donc pas bien) lui fait courir le risque d’une grossesse non désirée, ce qui est contraire à l’éthique professionnelle
 un gynécologue qui pose à une patiente un Nova T lui fait courir un risque de grossesse inacceptable, puisqu’il existe des DIU au cuivre plus efficaces

Une grossesse non désirée peut conduire à une IVG ; dans le cas d’un échec de DIU, la grossesse est une grossesse à risque : les grossesses sur DIU s’accompagnent en effet d’un risque accru de fausse couche ou d’accouchement prématuré. Il est donc inadmissible d’augmenter ce risque en posant un DIU moins efficace que les autres ! ! !


Cette situation ne peut pas changer sans l’effort conjoint des femmes et des professionnel(le)s de santé - sage-femmes, infirmièr(e)s, assistant(e)s sociales/aux, médecins, étudiant(e)s en professions de santé - solidaires des femmes.

Si vous êtes une utilisatrice de DIU, présente ou à venir :

 Ne vous laissez pas humilier, intimider ou mépriser par les gynécologues à qui vous demandez la pose d’un DIU. S’il vous traite de haut, changez de gynécologue !
 Refusez qu’on vous impose un DIU plutôt qu’un autre
 Refusez qu’on vous pose un Nova T et conseillez à vos amies de faire changer leur Nova T contre un DIU efficace.

 Evaluez votre gynécologue !

 Partagez vos expériences (bonnes et mauvaises) en me les écrivant. Je les posterai sur ce site.

Si vous êtes professionnel(le) de santé ou soignant(e) en formation :
 Lisez les articles de ce site consacré à la contraception et particulièrement au DIU
 Faites-les circuler autour de vous et interpellez vos enseignants ou vos confrères gynécologues sur leur pratique
 Ecrivez-moi pour poser vos questions et partager vos expériences.

Et, s’il vous plaît, faites circuler les liens vers cet article ! ! ! !

Martin Winckler (martin_winckler@yahoo.fr)



[1Aucun des deux types de DIU n’a un effet abortif, comme vous pourrez le lire dans cet article...




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