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Où est le vrai problème avec les urgences médicales ?
un vigoureux point de vue de Jean-Marie Gendarme
Article du 20 avril 2005

Les urgences ne sont pas un problème de permanence des soins mais celui de l’irresponsabilité hospitalière et politique de ces dernières années.

Il se dit ces temps ci sur les urgences, autour des services d’urgences, et sur le dos des médecins généralistes libéraux à peu prés n’importe quoi dans une sorte de déballage insigne, et surtout indigne pour les intervenants concernés.

On affirme tout et son contraire en l’exprimant sur l’air du temps sans savoir visiblement de quoi l’on parle : l’irresponsabilité est ici totale, affligeante.

Les services d’accueil des urgences ( SAU ) des hôpitaux sont une escroquerie administrative et un budget additionnel pour les hôpitaux.
Ceci rejoint et explique cela.

Cette appellation de service d’urgences est une escroquerie administrative dans la mesure où elle ne correspond plus depuis longtemps à aucune réalité médicale et recouvre un service fourre tout qui accueille n’importe quoi en terme de demandes de soins, le plus souvent au détriment de la qualité de traitement des urgences vraies arrivant dans un véritable cloaque sociétal.

Cette appellation recouvre surtout un service qui reçoit en fait, en plus de ce n’importe quoi en terme de soins, toutes les entrées de l’hopital, même prévues de longue date, et les transforme automatiquement, dés leur simple passage, en urgences et en statistiques plus époustouflantes les unes que les autres, dans une visée sonnante et trébuchante, pour justifier une perpétuelle demande tous azimuts de budgets complémentaires.

Cette appellation correspond enfin pour les hôpitaux à un budget additionnel non négligeable, puisque ce service apporte parfois à l’hopital un budget plus important que celui du propre service de chirurgie de l’établissement.
Il est là pour chaque hôpital une variable d’ajustement budgétaire qui est organisée de fait pour etre inflationniste.

Depuis que Monsieur E.Balladur - sous le lobbying de l’urgence hospitalière - a signé en quittant son fauteuil de premier ministre en 1995 parmi les dizaines de textes qui s’écoulent dans la précipitation à cet instant là dans l’usuelle " tradition républicaine ", le décret 95-647 autorisant les services d’accueil des urgences ( SAU ) à faire de la médecine générale, la boite de pandore a été ouverte, et l’ensemble de tous les mécanismes inflationnistes, irresponsables, pervers qui nous ont conduit à la situation où nous sommes à ce jour ont été mis en place et encouragés.
Cette signature s’est faite sans tenir aucun compte des 3 rapports du Pr.Steg, faits à la demande du ministre de l’époque, qui pointaient déjà cet envahissement péjoratif des services d’accueil des urgences par des actes de médecine générale.

L’urgence hospitalière il faut le rappeler mène depuis 20 ans dans notre pays une Politique d’hégémonie totale sur tout ce qui touche de prés ou de loin à l’urgence, dans un climat de complète irresponsabilité, qu’il s’agisse du souci premier des malades, de la qualité des interventions, de la correction due aux médecins de proximité, sans évoquer même un quelconque souci d’efficience économique.

Toutes ces dérives opérationnelles de l’urgence hospitalière, sa Politique hégémonique à tout va, ont été alimentées très largement par un environnement très spécial, unique dans le paysage de l’assurance maladie, et qui consiste pour ce service à vivre sans controles médicaux aucuns, sans controles de gestion, et en étant payées à guichets ouverts par l’assurance maladie, sur des prescriptions d’interventions autonomes, au tarif maximum permanent.

L’urgence hospitalière a depuis 20 ans bénéficiée de plans quasi annuels sur les urgences, un par Ministre concerné, avec des dotations supplémentaires annuelles tournant autour de 200 millions de francs.

Et au cours de ces 20 ans il a bien fallu faire sauter quelques verrous.
Le premier a été acquis rapidement à travers la manipulation de quelques textes, où les centres 15 structures initialement prévues pour etre une sorte de holding de tête de tous les moyens de secours de France se retrouvaient eux-mêmes redevenus simples moyens des samu pour en assurer le clientélisme établie sous la phrase gratuite : " appelez le 15 ".
Le second n’a eu de cesse à travers diverses manipulations de textes de laminer, de réduire le rôle des médecins sapeurs pompiers, le plus vaste réseau de médecins d’urgence de proximité de notre pays, " les secours des premières minutes, celles qui comptent double ", jusqu’à le faire disparaître, au prétexte qu’il fallait éliminer le seul service ayant les mêmes prérogatives médicales que les samu et donc vécu comme concurrent direct.

Le troisième était ces services d’accueil des urgences qui sur le papier n’avaient pas le droit de faire de la médecine générale.

Dés que le décret et sa signature furent acquis, comme par le plus grand des hasard, à tout l’hexagone en même temps, tous les services d’accueil des urgences ont décidé de faire passer toutes les entrées des hôpitaux ( programmées ou pas ) par les services d’accueil des urgences.

Ce qui a eu pour effet de mettre en place la fiction qui perdure jusqu’à ce jour, très savamment entretenue à chaque occasion du moment et désormais au gré des saisons, de la saturation des services d’accueil des urgences et d’une suractivité totalement délirante.
Alors que l’on fait juste par ce biais ridicule tourner le compteur à toute vitesse, en l’alimentant avec n’importe quoi.
Tout ceci n’est fait que pour gonfler artificiellement les bilans d’activité, pour pleurer après les budgets additionnels, des sommes considérables ont ainsi été englouties à fonds perdus pour arriver au résultat actuel : le tonneau des Danaïdes !

Toutes les statistiques en ce domaine sont totalement délirantes, dans la plus parfaite indifférence des responsables théoriquement concernés : il est là un sujet Tabou.
A Dieppe nous sommes ainsi à 30 000 urgences par an, soit 82 par jour ! A Rouen nous sommes à 90 000 par an, soit 246 par jour !! Et il y a bien pire encore.

Tous ces chiffres sont faux, et archi faux, cet aspect est parfaitement connu de tous mais l’administration de la santé continue à véhiculer ces notions biaisèes dans tous ses rapports officiels, et tous les schémas régionaux d’organisation sanitaires et sociales ( SROSS ) de première et seconde génération affichent dans leurs beaux rapports de pleines pages de chiffres totalement faux : pour quelle honnêteté ? pour quel souci réel de gestion ?

Qui se moque de qui ?

750 médecins hospitaliers bien assis dans leurs fauteuils de directeurs de samu ont ainsi conduit au massacre général de tout ce dossier aidés en cela à jet continu par des administratifs de la santé qui ne considèrent comme existants que les acteurs de l’urgence publique, et par les Politiques qui n’y comprennent rien, s’en désintéressent le plus souvent mais trouvent ce gadget de l’urgence très électoral.

L’urgence hospitalière met en avant sa posture morale de l’urgence ( vaste farce et vaste escroquerie morale dont la France est de plus en plus friande ) pour échapper à toutes règles comptables et de simple gestion commune.
L’intouchabilité de l’urgence hospitalière va durer ainsi jusqu’à quand ?

Quand on peut écrire sans états d’ame que le quart de la population française passe chaque année aux "urgences", et trouver cela quasiment normal : il y a quelque chose qui ne tourne pas rond !

L’éducation et l’information d’une clientèle sont possibles nous le savons tous au gré de notre exercice de tous les jours.
Dans les services d’accueil des urgences il faut simplement imposer le rejet où la taxation forfaitaire non remboursée comme en Belgique de tout ce qui n’est pas urgent et relève de la médecine générale.
En moins d’un mois avec ces conditions bien posées et tenues, vous rétablissez une paix royale dans tous les services d’accueil des urgences de France, qui auront alors même trop de personnel, et ceci sans mettre en péril le moins du monde la santé publique il faut arrêter de répéter toutes ces hypocrisies autour de ces notions fondamentales.

On doit aborder avec la même clarté, la même lucidité, les problèmes posés par les dérives opérationnelles des samu et smur de France, dont deux interventions sur trois n’ont aucune justification médicale, établies en auto prescription, sans aucuns controles ni évaluations, au tarif toujours maximum même sur une intervention inadaptée, et que l’on facture allègrement, même aux morts de quelques jours.

Est il normal qu’une urgence médicale en France, pour un traitement identique ( une urgence donnée correspond à un traitement univoque ) voit son échelle de coût aller d’un facteur 1 à un facteur 65 et plus selon qu’elle est traitée de manière libérale ou hospitalière ?

On doit dire la même vérité sur les centres 15 eux-mêmes, instrumentalisés par les samu pour asseoir leur interventionnisme et qui sont complètement à revoir dans leurs fondements et leurs rapports aux malades et professionnels de santé.

Tout le reste est du vent.
Et il s’en brasse beaucoup en ce moment dans notre milieu médical.

Il est là sous nos yeux un des plus importants gâchis humain et financier de ces dernières années qui vient conclure ce vaste dossier - massacré - de l’urgence libérale de proximité.

On a tout fait pour déresponsabiliser le secteur public de l’urgence, inflations des actes et des conduites professionnelles, sans controles, sans gestions médicales, sans gestions économiques, disons le sans fard pour faire du chiffre.

Et dans le même temps on a déconstruit très méthodiquement le magnifique réseau de médecins d’urgence libéraux qu’étaient les médecins sapeurs pompiers libéraux, et on a surtout rien fait pour pérenniser et organiser le support des bonnes volontés médicales libérales en garde : aucune prospective, aucune revalorisation réelle, aucun financement, aucun partenariat réel.

Le défaut de présence médicale libérale qu’on l’appelle garde ou permanence des soins n’est donc pas la cause de l’encombrement des services dits d’urgence, mais bien le résultat conjoint de l’irresponsabilité des responsables de l’urgence hospitalière seuls interlocuteurs des Politiques en ce dossier.

Le déséquilibre de ce dossier est accablant, il était donc fatal à terme que les médecins libéraux après avoir beaucoup donné en ce domaine votent avec leurs pieds et quittent ce domaine précis.

Et le monstre que l’on a crée au plan public, qui seul n’est qu’une baudruche n’en finit plus de se dégonfler bruyamment.

Les médecins sapeurs pompiers libéraux qui étaient les garants du premier secours de proximité à toute la France, et permettaient par leur présence active à l’urgence hospitalière de travailler dans de bien meilleures conditions, et d’avoir ainsi le beau rôle du renfort à moindres frais, ont disparus et l’urgence hospitalière se retrouve dans toute sa nudité opérationnelle.

L’urgence hospitalière est une urgence à un coup ( un appel : un véhicule ), et au delà de 15 km de distance ce n’est même plus du secours médical mais bien du ramassage secouriste qui signe le constat d’une faillite cinglante.

Tout ceci pour dire qu’il faut en finir avec ces faux semblants et ces discours biaisés et que l’on ne résoudra pas le problème de cette permanence des soins et des urgences même au plan économique par une seule redéfinition de la place du médecin généraliste libéral, mais bien surtout par l’indispensable remise à plat de l’urgence hospitalière, qui doit revenir à une gestion économique véritable dont nous sommes très loin, à une gestion médicale et à une évaluation médicale qui sera cruelle, et à des contrôles normaux, sous références médicales, de l’assurance maladie.

Toute l’attitude qui consiste à alimenter plus un secteur au dépend de l’autre, à déséquilibrer ce dossier ne résoudra rien : nous nous trouvons dans cette très exacte prospective depuis 20 ans pour le résultat insigne et des impérities à l’infini qui s’étalent sous nos yeux.

Jusqu’à quand ?

Jean-Marie Gendarme, médecin généraliste

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