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Depuis la Lune, est-ce qu’on voit la Grande Muraille de Chine ?
20 Janvier 2003
Article du 8 janvier 2005

C’est une question courante des jeux de société, et tout le monde y répond par oui, alors que c’est faux. D’ailleurs, tout ce que le commun des mortels, comme vous et moi, croit savoir sur la Grande Muraille de Chine est faux, je le sais depuis que j’ai lu un très bel article que lui a consacré le numéro de janvier 2003 de la revue National Geographic France.

La première chose que j’ai apprise, c’est que, contrairement à ce que je croyais, il n’existe pas une muraille mais plusieurs. Car plusieurs dynasties régnantes de Chine ont fait construire des murs pour protéger leur empire, en particulier dans le Nord du pays, région la plus propice aux invasions.

Les premières constructions ont été édifiées à la fin du cinquième siècle avant Jésus-Christ, lors des incursions de cavaliers nomades venus d’Asie Centrale que les Chinois nommaient les Hu, et dont l’origine reste mystérieuse. Entre 221 et 207 avant J.C., la dynastie des Qin (prononcer « tchin »), qui fut la première a unifier l’empire de Chine, entreprit de relier tous les vieux murs entre eux et de construire de nouvelles fortifications.

L’empereur Qin Shiuhangdi fit enrôler de force des milliers d’hommes et sa muraille fut bientôt baptisée « le plus grand cimetière du monde », en référence aux ouvriers qui moururent pendant son édification.

Les dynasties ultérieures édifièrent à leur tour des murailles, en particulier la dynastie Ming, qui régna sur la Chine entre 1368 et 1644 après Jésus-Christ. C’est sous les Ming que furent construits les tronçons de Grande Muraille les plus impressionnants, ceux que nous connaissons grâce aux films et aux dépliants touristiques.

Car, alors que la plupart des autres structures étaient tout simplement en terre damée, la muraille des Ming est en pierre et en brique. On estime que cette muraille mesure 2700 kilomètres de long, et l’ensemble des murailles édifiées en Chine s’étendraient sur près de 6000 kilomètres. Mais ces chiffres ne sont pas certains, car de nombreux tronçons n’ont jamais été étudiés.

Malgré son gigantisme, la Grande Muraille des Ming n’a jamais vraiment isolé l’Empire des envahisseurs, car ses multiples tronçons ne furent jamais tous joints. Mais à certaines époques, le chemin de ronde qui serpente à son sommet servit à déplacer des troupes et du matériel plus rapidement.

Autre source de surprise : le terme même de grande muraille n’est pas chinois. Le mot qui le désigne, changcheng, signifie simplement « long mur » et les grandes murailles construites par les Ming portent celui de bianqiang, c’est à dire « murs frontaliers ». C’est aux Européens qui visitèrent la Chine au début du 20e siècle qu’on doit le terme de Grande Muraille et c’est ce qui donna à Sun Yat-Sen et à Mao Zedong l’idée d’en faire le symbole de la nation chinoise.

En 1985, Deng Xiaoping ordonna sa restauration et aujourd’hui, à l’ère du réalisme économique, elle est évidemment l’un des hauts lieux du tourisme en Chine, en particulier à Badaling, à 80 km de Beijing (Pékin). C’est aussi aux écrivains européens du début du 20e siècle que l’on doit l’idée que la Grande Muraille est visible de la Lune.

Idée que les astronautes ont démentie : certes, quand on est orbite autour de la Terre, de nombreuses constructions humaines sont visibles au sol, y compris la grande muraille. Mais depuis la lune, qui se trouve à 384 467 kilomètres de la Terre, il est impossible distinguer une structure qui mesure en moyenne 7 mètres de haut et au maximum, dix mètres de large à sa base et 6 mètres cinquante à son sommet. Et pourtant, malgré le démenti des astronautes, le mythe de la Grande Muraille - comme tout ce qui est chinois, d’ailleurs - continue à brouiller le sens de la mesure des occidentaux.

National Geographic France, Janvier 2003, Associated Press
http://geography.about.com/library/weekly/aa090100a.htm?terms=China


Après avoir lu cet article, Philippe Raynaud m’envoie cette intéressante précision :
[...] Le démenti des astronautes n’est pas très utile si l’on se livre à un calcul très simple - on fait souvent foi à des autorités alors que l’on dispose des moyens de se rendre compte par soi-même.

Tout simplement donc : voir une structure de 10 mètres de large à 384 467 kilomètres de distance, ou donc de 1 mètre à 38 446 kilomètres, cela équivaudrait à voir un objet large de 1 millimètre à 38 kilomètres !

Que l’on puisse voir (à l’oeil nu) la Grande Muraille de l’espace, certes, mais à quelle distance ? 10 km (1 mm à 1 mètre) ? 50 km (1 mm à 5 mètres) : c’est déjà plus difficile. 100 km (1 mm à 10 mètres) : quelle bonne vue !

Voilà, la certitude repose sur peu de choses.

Bien cordialement.

Ph. Raynaud.

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